Hervé Cheuzeville : "Dans son discours à Kigali au mémorial du génocide contre les Tutsis, Emmanuel Macron a évoqué les efforts de la France pour aboutir aux accords de paix d'Arusha en 1993, et il a bien fait de le faire. Mais..."
Dans son discours à Kigali au mémorial du génocide contre les Tutsis, Emmanuel Macron a évoqué les efforts de la France pour aboutir aux accords de paix d'Arusha en 1993, et il a bien fait de le faire. Mais, dans la phrase suivante, il a ajouté que ces accords de paix avait été torpillés par la logique génocidaire, oubliant d'évoquer deux éléments déterminants dans le déclenchement du génocide contre les Tutsis le 7 avril 1994:
1) L'attentat contre l'avion du président rwandais de l'époque, Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994 (qui coûta la vie à ce président et à son collègue burundais) et
2) L'offensive militaire générale du Front Patriotique Rwandais de Paul Kagame contre les forces gouvernementales dans les heures qui ont suivi cet attentat. S'il n'y avait pas eu cet attentat et cette offensive générale, le génocide contre les Tutsis n'aurait pas pu avoir lieu et le processus de paix accords d'Arusha aurait pu se poursuivre, avec la mise en place d'un gouvernement de transition, la fusion des deux armées (gouvernementale et rebelle) et l'organisation d'élections auxquelles tous les partis, y compris le FPR, auraient pu participer.
Des centaines de milliers de vies auraient été épargnées, celles des Tutsis qui ont été massacrés par les génocidaires hutus, et celles des Hutus et des Twas qui ont été massacrés par le FPR (et dont Macron n'a pas parlé). Et il n'y aurait pas eu l'invasion et l'occupation du Zaïre/Congo qui a causé des millions de morts à partir de 1996 (et dont Macron n'a pas non plus parlé).
Oui, je sais, on ne refait pas l'histoire. Mais on ne doit pas non plus déformer l'histoire, surtout quant on est président!
Hervé Cheuzeville.