« Rwanda : la France n’est pas la seule en cause ». Il serait temps de se poser la question de savoir qui a soutenu la rébellion et continue de soutenir le FPR, aujourd’hui au pouvoir à Kigali.10
« Il faudrait que bien d’autres pays ouvrent leurs archives pour faire éclater la vérité et ainsi trouver les vrais responsables de cette grande tragédie. »
Je ne puis que réagir au courrier de M. Michel Le Borgne concernant le rapport de la commission Duclert : « Rwanda : un rapport accablant pour la France » (O.-F. du 3 avril).
« Il faudrait aussi écouter les Rwandais eux-mêmes qui ont tous terriblement souffert et souffrent encore »
"Personnellement, je connais ce petit pays des mille collines depuis 1976, en ayant bien suivi le drame vécu par l’ensemble de la population depuis l’attaque des rebelles du FPR (Front patriotique rwandais), venus d’Ouganda, le 1er octobre 1990 et dans les années qui ont suivi le génocide d’avril 1994.
Il serait temps de se poser la question de savoir qui a soutenu la rébellion et continue de soutenir le FPR, aujourd’hui au pouvoir à Kigali. On pointe les responsabilités de la France, dans la plupart des médias, mais il faudrait que bien d’autres pays ouvrent leurs archives pour faire éclater la vérité et ainsi trouver les vrais responsables de cette tragédie.
Le rapport Duclert ne s’est évidemment penché que sur le rôle de la France. Les deux présidents cités, Juvénal Habyarimana et François Mitterrand, sont morts. Le premier tragiquement dans un attentat, quant au président français qui a multiplié les efforts pour aboutir aux accords de paix d’Arusha, le 4 août 1993, en tentant de mettre d’accord les deux parties en conflit, il n’est pas aussi coupable qu’on veut bien le laisser supposer. Il faut savoir que c’est aussi le FPR qui a violé ces accords de paix, qui pourtant lui avait donné une belle part, en reprenant les combats sur le front nord, dès le lendemain de l’attentat du 6 avril 1994 qui a littéralement décapité le pays et tué les trois Français de l’équipage.
Cela fut l’élément déclencheur du génocide qui, contrairement aussi à ce qui est dit, n’était pas préparé et c’est ce qu’a confirmé le tribunal international d’Arusha. La France avec son armée n’était plus présente au Rwanda et, en revanche, elle fut seule à intervenir, avec un mandat du Conseil de sécurité de l’Onu pour arrêter les massacres, ce fut l’opération Turquoise.
Là, il faudrait écouter et lire les mémoires des militaires qui étaient sur le terrain : que ce soit le général Lafourcade ou le colonel Hogard, mais aussi le général Dominique Delort qui vient de publier, aux Éditions Perrin, Guerre au Rwanda – l’espoir brisé 1991-1994.
Beaucoup ont été au cœur de ces événements tragiques et savent mieux que quiconque ce qui s’est vraiment passé pour que le Rwanda, jusqu’alors un petit pays paisible qui se développait, plonge ainsi dans l’horreur. Il faudrait aussi écouter les Rwandais eux-mêmes car tous, Hutus, Tutsis et Twas ont terriblement souffert et souffrent encore.
Le docteur Denis Mukwege, prix Nobel de la paix, lance aussi un cri d’alarme et souhaite que le rapport Mapping sorte des tiroirs de l’Onu et rende enfin justice au peuple congolais, dont les victimes sur le sol de l’ex-Zaïre sont chiffrées à près de 7 millions… Il faudrait aussi pouvoir se poser des questions sur les intérêts économiques qui provoquent tant de guerres à travers le monde. Alors oui, que vaut la vie d’un homme, d’un Noir particulièrement, face à l’exploitation des richesses et des minerais rares dont ont besoin les multinationales et particulièrement abondants dans le Kivu ?"