Rwanda, le grand bluff : accueil de 30 000 migrants africains
Accueil de 30 000 migrants au Rwanda, une annonce qui tombe à pic
Laurent Larcher (LA CROIX), le 23/11/2017
Réagissant au scandale de l’esclavage en Libye, Kigali souhaite accueillir des migrants. Au même moment, l’ONU se penche sur l’usage étendu de la torture au Rwanda.
En l’état, c’est une discussion entre Kigali et la Libye. À la suite de la révélation par la chaîne américaine CNN de l’existence d’un marché aux esclaves en Libye, la chef de la diplomatie rwandaise, Louise Mushikiwabo, a annoncé, mercredi 22 novembre, que son pays était prêt à accueillir jusqu’à 30 000 migrants africains vivant dans des conditions inhumaines en Libye.
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« Le Rwanda, comme le reste du monde, a été horrifié par la tragédie en cours en Libye où des hommes, des femmes et des enfants africains qui étaient sur la route de l’exil, ont été arrêtés et transformés en esclaves », a expliqué Louise Mushikiwabo. « Étant donné la philosophie politique du Rwanda et notre propre histoire, nous ne pouvons pas rester silencieux quand des êtres humains sont maltraités et vendus aux enchères comme du bétail », a-t-elle ajouté.
Louise Mushikiwabo répondait ainsi à l’appel du président de la commission de l’Union Africaine (UA), Moussa Faki Mahamat, qui avait sollicité l’aide des pays du continent face à cette crise. La semaine dernière, le président de l’UA, Alpha Condé, avait exprimé dans un communiqué, « son indignation face au commerce abject de migrants qui prévaut en ce moment en Libye et condamne fermement cette pratique d’un autre âge ». « Ces pratiques modernes d’esclavage doivent cesser et l’Union africaine usera de tous les moyens à sa disposition pour que plus jamais pareille ignominie ne se répète », affirmait le communiqué.
On peut s’interroger sur la sincérité de la générosité affichée par Kigali à l’heure où le Rwanda est pointé du doigt à l’ONU pour son recours systématique à la torture. En effet, jeudi 23 et vendredi 24 novembre, le pays des mille collines est à l’ordre du jour d’une séance ordinaire du Comité contre la torture des Nations unies. Signataire en 2008 de la Convention internationale contre la torture, Kigali est accusé de ne pas l’appliquer. Un rapport publié en octobre par Human Rights Watch (HRW), documente, par exemple, l’usage de la torture des prisonniers détenus dans des camps militaires.
Ces accusations sont très mal reçues par le régime. Kigali boycotte systématiquement les organisations internationales qui veulent enquêter sur le sujet. « 23 ans après le génocide, et malgré ses succès économiques le Rwanda se distingue aujourd’hui comme l’un des pays les plus répressifs en Afrique et où la censure et l’autocensure sont généralisées. », notait la FIDH dans son enquête consacrée à l’état de la démocratie rwandaise, en août 2017.
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Laurent Larcher
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ZOOM Kigali au Rwanda, souhaite accueillir des migrants. / Olivier Matthys/AFP En l'état, c'est une discussion entre Kigali et la Libye. À la suite de la révélation par la chaîne américaine C...