La France, toujours en croissance zéro, demande l'indulgence de l'Europe
Une usine de sacs plastique en France
La France est restée empêtrée au deuxième trimestre dans une croissance zéro, forçant le gouvernement à corriger très nettement ses prévisions pour 2014, tout en appelant à l'indulgence européenne pour le déficit public.
Le pays a vu son Produit intérieur brut (PIB) en volume stagner au deuxième trimestre comme déjà au premier, a annoncé l'Insee jeudi, relevant que la quasi totalité des moteurs de croissance était en panne.
Cette panne a été d'envergure européenne au printemps: l'Allemagne a annoncé jeudi une contraction de 0,2% de son PIB au deuxième trimestre, tandis que l'Italie est elle retombée en récession.
En France, cette croissance zéro au printemps s'explique en particulier par un nouveau recul de l'investissement des entreprises (-0,8% par rapport au premier trimestre, qui avait déjà vu une baisse de 0,7%), en dépit de l'aide fournie par le gouvernement notamment via le CICE (Crédit d'impôt compétitivité et emploi).
Au total le gouvernement soutient les entreprises à hauteur de 40 milliards d'euros en quatre ans.
- Les "ponts" pointés du doigt -
La production totale de biens et services en France s'est légèrement contractée au deuxième trimestre (-0,1%), ce que l'Insee explique "en partie" par "le nombre plus élevé qu'en moyenne de jours de ponts potentiels au deuxième trimestre".
Par ailleurs le commerce extérieur a confirmé son statut de point faible de l'économie française: sa contribution a été "négative", selon l'Insee, et a coûté 0,1 point de PIB sur la période. Les exportations ont stagné au deuxième trimestre, quand les importations augmentaient de 0,4%.
Fin juin, la France accusait un déficit commercial de quelque 30 milliards d'euros, soit presque le même niveau qu'à la même date en 2013.
Les stocks eux aussi ont pesé sur l'activité.
Au final, seules la consommation des ménages (+0,5% au deuxième trimestre par rapport au premier) et la dépense publique (+0,5%) ont soutenu l'activité. Ce qui se traduit par une contribution positive au deuxième trimestre de la demande intérieure, qui a apporté 0,2 point de PIB.
- Résistance de la consommation, en trompe l'oeil -
Mais même cette progression de la demande privée est en partie en trompe l'œil: l'Insee explique en effet que la consommation a surtout été soutenue par un bond de 3,5% des dépenses globales d'énergie, corrigeant un recul de 3,9% au premier trimestre. Il s'agit d'un retour à la normale après un hiver très doux, précise l'Institut de statistiques.
Les dépenses en "biens fabriqués", plus révélatrices de la vraie propension à dépenser des Français, sont elles "étales", selon l'Insee (+0,1% au deuxième trimestre, après une stagnation au premier).
Du côté des ménages toujours, leurs investissements, c'est-à-dire pour l'essentiel les achats de logements, ont fortement reculé, de 2,4% au deuxième trimestre après -2,9% au premier, ce qui est de très mauvais augure pour un secteur de la construction déjà en crise.
Au total, la France se retrouve fin juin avec un "acquis de croissance" de 0,3%, terme technique qui signifie que sans accélération, la croissance pour l'ensemble de 2014 ne dépasserait pas ce taux, bien loin de la prévision initiale de 1% du gouvernement.
- Le gouvernement en appelle à la BCE et à l'Europe -
Le ministre des Finances Michel Sapin a pris acte de cette "panne" d'activité dans une tribune publiée jeudi par le Monde, et a revu à 0,5% la prévision de croissance officielle pour cette année, à peine mieux que la croissance de 0,4% enregistrée en 2013.
Il n'attend pas pour 2015 une croissance "très supérieure" à 1%, a-t-il précisé.
Face à la croissance atone et à une inflation plus faible que prévu, le ministre a prévenu que le déficit public français dépasserait 4% du PIB cette année, au lieu des 3,8% espérés auparavant, et estimé qu'il fallait "adapter le rythme de réduction des déficits" en Europe.
La France devra abandonner également son espoir de ramener en 2015 le déficit public à la limite européenne de 3% du PIB, comme l'a d'ailleurs déjà reconnu Jean-Christophe Cambadélis, premier secrétaire du Parti socialiste.
M Sapin a aussi demandé à la Banque centrale européenne (BCE) d'aller "au bout de ses possibilités" face à la morosité économique dans toute la zone euro, et face au risque de déflation.
© 2014 AFP