L'ambiguïté d'un général-muet
From: Kami <cecil.kami@yahoo.fr>
Date: March 26, 2013, 4:19:53 PM EDT
Subject: *DHR* L'ambiguïté d'un général-muet
L'ambiguïté d'un général-muet
En l'espace d'un petit trimestre, on les a tous entendu parler ou alors ce sont les médias qui parlaient d'eux. Férus de leurs expériences martiales sinon de leurs ambitions politiques, tous nos généraux ont, chacun à sa façon, occupé l'actualité en relation avec l'avenir de notre cher pays. Paul Kagame le président, Emmanuel Habyarimana dit Mukaru et même... Bosco Ntaganda le Terminator, tous ont fait les titres des publications qui s'intéressent au Rwanda. Tous ? Non, il en reste un qui orgueilleusement se confine dans un mutisme qui commence à « bien faire » comme dirait l'autre. Comme s'il ne voulait pas se compromettre, le général Faustin Kayumba boude les médias alors qu'en opposant politique beaucoup d'observateurs attendent de lui qu'il mouille davantage son maillot et qu'il arrête de lâchement se réfugier derrière le traumatisme de l'attentat dont il fut victime il y a un bon moment déjà.
Les partisans de son « congrès » s'expriment certes et très souvent même, mais que disent-ils que les Rwandais ne sachent déjà ? Qu'ils sont en sainte alliance avec les FDU ? C'est vraiment tout à leur honneur. Et alors! Que, diplomatiquement, ils ont fait bougé les choses ? Justement; sous leurs yeux, leur supposé adversaire est en train de reprendre l'avantage avec le récent hara-kiri téléguidé du M23. Qu'au sein de l'armée, une partie de la troupe attendrait le « messie » Kayumba Nyamwasa ? Sans blague! Et pourquoi n'attendrait-elle pas le « sauveur » Mukaru, lui qui se targue d'avoir fait baisser le quota de gifles au sein des Rdf ? Hein ! Pourquoi n'attendrait-elle pas l'inénarrable Gasana et son Urukatsa dont justement la symbolique renvoie à une victoire historique sur les Inkotanyi ? Non, ils pourront demain éluder la question, mais la communication du Rnc est en train de s'essouffler. Son action aussi ?
Même s'ils ont minimisé l'acte du transfuge Xavier Nsengimana, ce mois encore, c'est toute une frange non contente du dirigisme des militaires qui a claqué la porte, préférant se regrouper au sein d'une nouvelle formation (PPR – Imena) au lieu de prendre langue avec leurs camarades d'hier. Même s'ils n'ont pas encore fait leurs preuves, l'existence même de leur parti est un terrible désaveu dans le chef du Rnc. La mayonnaise avait peu de chance de prendre écrivais-je en d'autres circonstances. Et la suite risque d'être encore moins brillante pour les amis de lutte (politique) du général Kayumba. Plus que ces défections donc, l'action du Rwandan National Congress risque de marquer sensiblement le pas pour principalement deux raisons : la lassitude d'un peuple (abusé) et ce qu'il convient de désigner comme un janotisme du général Kayumba.
Le peuple. On lui a annoncé une fin de partie prochaine pour la clique Kagame. Avec une intelligente occupation médiatique, ceux que Kigali nomme désormais « la bande des quatre » ont exposé, autant qu'ils le pouvaient, le linge sale que leur ancien patron avait jusque-là réussi à camoufler. Se disant qu'il valait mieux tard que jamais, le peuple a accueilli avec enthousiasme les confessions et contritions de ces fils du Rwanda qui venaient d'abandonner le chemin de la perdition. Le plateau était d'une beauté qui faisait rêver : un initié des affaires du parti au pouvoir (Rudasingwa), un ancien patron de l'espionnage (Karegeya), un ancien haut magistrat (Gahima) et, last but not least, un général (Kayumba Nyamwasa), c'est-à-dire tout simplement celui qui fut dans les secrets des dieux... Deux ans après la mise en commun de leurs talents, le peuple attend toujours et son rêve se révèle n'être qu'un mirage jour après jour.
Il est vrai que le mutisme d'un général pose plus de problème qu'il ne contribue à en résoudre. L'empathie dont Kayumba fut l'objet juste après son agression est donc en train de s'effriter et les mêmes qui condamnaient cet attentat se demandent, aujourd'hui plus que jamais, pourquoi côté RNC, on continue d'entretenir un flou méprisant sur le secret criminel le mieux gardé du Rwanda, à savoir l'assassinat du président Habyarimana. Tout part de là. Alors que dans quelques jours seulement, l'on va, pour la 19ème fois, se replonger dans les souvenirs de cette douleur nationale, il devient de plus en plus insultant pour ce général-muet d'abuser de l'indulgence des Rwandais. N'a-t-on pas entendu même une rescapée de Gakurazo expliquer les détails de ce qu'ont fait les éléments du 157è bataillon de l'Apr sous les ordres du boucher Ibingira ?
En taisant les forfaits d'un sorcier, vous risquez de le voir exterminer tous les vôtres, dit-on. Est-ce là une des parties cachées du programme du RNC ? L'énigme Kayumba n'a plus droit d'être. Ne disait-il pas hier encore qu'il était prêt à faire face à la justice au cas où ses crimes venaient à lui être reprochés ? Chiche donc! Qu'attend-il pour imiter cet autre « qui ne faisait pas de prisonniers » et qui vient de se livrer au CPI ? Car ne pas éclairer les Rwandais sur ce qu'il sait sur l'attentat du 6 avril équivaut, ni plus ni moins, à couvrir un crime dont il est, jusqu'à preuve du contraire, l'un des perpétrateurs... Un des soldats qui ont servi sous les ordres de ce général m'a un jour mis en garde alors que je déplorais ce qu'il venait de subir à Johannesburg. Lui et Kagame c'est bonnet blanc et blanc bonnet, m'avait-il dit en substance. L'ambiguïté entretenue par Kayumba me pousse aujourd'hui à commencer à croire ces dires. A moins que...
Cecil Kami