CENTRAFRIQUE: CATHERINE SAMBA-PANZA, LA MAIRE DE BANGUI, ÉLUE PRÉSIDENTE DE TRANSITION
INTERNATIONAL - Le parlement centrafricain a choisi lundi 20 janvier la maire de Bangui pour assurer la transition à la tête du pays. Catherine Samba-Panza a été élu présidente de transition au second tour. Elle aura pour mission première de ramener la paix dans un pays déchiré par des tueries interreligieuses. Depuis le début de la crise, elle n'a eu de cesse de dénoncer les exactions et d'appeler toutes les parties du conflit à déposer les armes.
La nouvelle présidente centrafricaine a recueilli au second tour de scrutin 75 voix, devançant l'autre candidat, Désiré Kolingba, fils d'un ancien chef de l'Etat, qui a obtenu 53 suffrages, selon les résultats lus dans la salle et suivis d'applaudissements de l'assistance qui a entonné l’hymne national centrafricain. Aucun des huit candidats au poste de président de transition n'avait obtenu la majorité absolue au premier tour.
Lors de sa prise de fonctions, Catherine Samba Panza avait indiqué avoir trouvé une "ville en état de délabrement total, avec des besoins importants en termes d'eau, d'assainissement, de santé, d'éducation". Elle succède à l'ex-président Michel Djotodia,contraint à la démission le 10 janvier pour son incapacité à mettre fin aux tueries interreligieuses.
"Mes enfants (...) déposez vos armes"
Prenant la parole devant les parlementaires dès son élection, la maire de Bangui - première femme de l'histoire de Centrafrique à accéder à ce poste- a lancé un "appel vibrant" à renoncer aux armes. "Je lance un appel vibrant à mes enfants anti-balaka (miliciens chrétiens) qui m'écoutent. Manifestez votre adhésion à ma nomination en donnant un signal fort de dépôt des armes", a-telle déclaré, ajoutant: "à mes enfants ex-Séléka qui m'écoutent aussi, déposez vos armes". "A compter de ce jour, je suis la présidente de tous les Centrafricains sans exclusive", a-t-elle assuré.
Née le 26 juin 1954, elle est décrite comme une battante ayant déjà une longue expérience politique. Dans un portrait consacré en juillet dernier à la présidente élue, La Croix évoquait "le verbe précis, la pensée claire, le regard droit" de "cette chef d’entreprise de 58 ans". "Elle n’appartient ni à l’ancienne rébellion Séléka, ni aux hommes politiques qui sautent de ministère en ministère au gré des coups d’État (...).Après des études de droit en France, elle s’est démenée pour ouvrir une société de courtage en assurance dans un pays pourtant peu propice aux affaires", racontait aussi le quotidien.
Lire aussi : Scènes de liesse à Bangui après la démission du président
A Bruxelles, les ministres européens des Affaires étrangères ont approuvé lundi le lancement d'une opération militaire de l'Union européenne (UE) en Centrafrique, en appui aux forces africaine et française, avec des soldats - leur nombre pourrait s'élever à 500 - qui seraient chargés d'aider à la sécurisation de Bangui, a-t-on indiqué de source officielle.
Toujours à Bruxelles, les pays donateurs se sont engagés à débloquer près de 500 millions de dollars pour la Centrafrique en 2014, ont indiqué l'UE et l'ONU. Ils "se mobilisent totalement pour tenter de mettre fin à la grave crise" humanitaire de la Centrafrique, qui "a été si longtemps oubliée", a déclaré la commissaire européenne à l'aide humanitaire, Kristalina Georgieva.
Élections générales prévues au plus tard au premier semestre 2015
La nouvelle élue va prêter serment devant la Cour constitutionnelle provisoire avant la formation d'un nouveau gouvernement. Elle aura peu de temps pour arrêter l'implosion du pays: selon le calendrier de la transition, des élections générales doivent être organisées au plus tard au premier semestre 2015, la France souhaitant pour sa part qu'elles se tiennent en 2014.
Un mois et demi après le début de l'intervention française, la situation sécuritaire dans la capitale, où la plupart des soldats français sont stationnés, s'améliore progressivement malgré des explosions de violence localisées. Mais dans un pays de plus de 600.000 km2, très pauvre malgré son potentiel minier et agricole, un déploiement reste très compliqué dans les zones reculées et les témoignages d'habitants et d'ONG décrivent une situation chaotique et largement hors de contrôle.
Le pays est plongé dans le chaos depuis la prise du pouvoir par les armes en mars 2013 par la rébellion majoritairement musulmane de la Séléka, et des affrontements opposent régulièrement des membres des communautés musulmane et chrétienne.
Dans un communiqué diffusé par l'Élysée, François Hollande a félicité Catherine Samba Panza pour son élection.
"Il lui revient désormais de mener à bien la réconciliation et l’apaisement nécessaires en RCA, en vue de la tenue d'élections démocratiques. La France se tient à ses côtés dans cette tâche difficile", écrit l'Élysée.
Biographie non officielle (selon Wikipedia)
Née à N'Djamena (Tchad) en 1956, d'un père camerounais et d'une mère centrafricaine, Catherine Samba-Panza grandit à Bangui où son oncle maternel, un diplomate, est son tuteur, avant d'entamer des études de droit en France. Elle y obtient divers diplômes : une licence en sciences de l’information et de la communication, ainsi qu'un diplôme d’études supérieures spécialisées (DESS) en droit des assurances obtenus à l’Université Panthéon-Assas. Elle est mariée à Cyriaque Samba-Panza, un homme politique centrafricain. Ce dernier a été plusieurs fois ministre, notamment sous les présidences d'André Kolingba et de François Bozizé. Ils ont trois enfants. Dans les années 1990, elle revient à Bangui pour intégrer la filiale en Centrafrique du groupe Allianz. Avant d'entamer sa carrière politique, elle a fondé et dirigé une société de courtage en assurance3.
Elle milite au sein de l'association des femmes juristes de Centrafrique (AFJC), association spécialisée dans la lutte contre les mutilations génitales et toutes les autres formes de violence que les femmes centrafricaines subissent. Elle est également formatrice en droits de l'homme au sein du programme Afrique d'Amnesty International, ce qui l'amène à rencontrer de nombreuses ONG dans la région des Grands Lacs1.
En 2003, peu après le coup d'État de François Bozizé, Catherine Samba-Panza co-préside le dialogue national puis est élue présidente du comité en charge de suivre et d'évaluer régulièrement les recommandations issues de ce dialogue1.
Deux mois après que la Séléka a renversé le régime du président François Bozizé, en mai 2013, elle est nommée maire de Bangui par le nouveau régime. La maire de Bangui n'est affiliée à aucun grand parti politique1.
Suite à la crise en Centrafrique, le président Michel Djotodia fut poussé à la démission le 10 janvier 2014. Un président de transition doit être alors élu par le Conseil national de transition (CNT), le Parlement provisoire centrafricain, avant la tenue d'élections nationales en 2015.
Catherine Samba-Panza fait partie des 8 candidats retenus par le CNT parmi 24 candidats déclarés et est l'une des favoris. Poussée par les associations féministes, non marquée politiquement par un camp, elle a le soutien de nombreux diplomates étrangers4.
Frôlant l’élection dès le premier tour avec 64 voix (il lui en manquait une pour obtenir la majorité absolue)4, elle l'emporte au second tour, et l'emporte sur Désiré Kolingba, le fils de l'ancien président André Kolingba5. Elle obtient 75 voix contre 53 et devient la première femme centrafricaine à accéder au rang de chef de l'État. La nouvelle présidente de transition a pour mission de ramener la paix dans un pays ravagé par les violences inter-religieuses.
Lire aussi:
» Démission du président centrafricain : scènes de liesse à Bangui
» Centrafrique : moins d'un Français sur deux favorable à l'opération Sangaris
» Le récit de l'opération Sangaris