Afrique/Kenya : La solidarité ethnique ou le droit de massacrer "l'autre"
Kenya : les députés de la majorité se mobilisent derrière le vice-président Ruto à la veille de son procès
Arusha, 03 septembre 2013 FH) – Les députés de la coalition « Jubilee » au pouvoir à Nairobi se mobilisent à la veille du procès du vice-président kényan William Ruto poursuivi, avec le journaliste Joshua Sang, devant la Cour pénale internationale (CPI) à La Haye, aux Bas- Bas.
Ces parlementaires seront présents en grand nombre à la Cour lors du démarrage de l’affaire mardi prochain, selon la presse kényane. Plus important que ce soutien moral, ils envisagent de pousser leur institution à voter le retrait du Kenya de l’Assemblée des Etats-parties au Statut de Rome créant la Cour.
Ce retrait suffirait-il pour mettre fin aux poursuites contre Ruto et son patron, le président Uhuru Kenyatta dont le procès doit démarrer en novembre ? En guise de réponse, l’unité des relations publiques de la CPI rappelle les dispositions de l’article 127 du Statut de Rome. « Tout État Partie peut, par voie de notification écrite adressée au Secrétaire général de l'Organisation des Nations Unies, se retirer du présent Statut. Le retrait prend effet un an après la date à laquelle la notification a été reçue, à moins que celle-ci ne prévoie une date postérieure ». Pour ce qui est de l’impact d’un éventuel retrait kényan, le statut poursuit : « son retrait ne dégage pas l'État des obligations mises à sa charge par le présent Statut alors qu'il y était Partie, y compris les obligations financières encourues, et n'affecte pas non plus la coopération établie avec la Cour à l'occasion des enquêtes et procédures pénales à l'égard desquelles l'État avait le devoir de coopérer et qui ont été commencées avant la date à laquelle le retrait a pris effet ». Enfin, «le retrait n'affecte en rien la poursuite de l'examen des affaires que la Cour avait déjà commencé à examiner avant la date à laquelle il a pris effet ». Sang, Ruto et Kenyatta sont poursuivis pour crimes contre l’humanité perpétrés dans leur pays durant les violences post-électorales de 2007-2008.
A la fin de mai dernier, c’est le sommet de l’Union africaine qui avait tenté de faire pression pour obtenir l’annulation des poursuites contre les deux plus hauts responsables du Kenya. Les chefs d’Etat du continent avaient adopté une résolution exigeant l’abandon des poursuites engagées par la CPI contre Uhuru Kenyatta, qui faisait sa première sortie sur la scène panafricaine. S’exprimant à la clôture du sommet, le 27 mai, le Premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn, président en exercice de l’organisation continentale, avait accusé la Cour de se livrer à « une sorte de chasse raciale » aux Africains.
Plus tôt dans le même mois de mai, l'ambassadeur kényan aux Nations Unies, Macharia Kamua, avait appelé « les nations amies à user de leurs bons offices et à convaincre la CPI de reconsidérer la poursuite» des affaires kényanes. «Les Kenyans (...) se sont exprimés d'une voix forte, claire et précise quand ils ont élu (en mars) de manière écrasante Uhuru Kenyatta et William Ruto », affirmait le diplomate. « Les Kényans (...) ont en fait envoyé un message clair et non équivoque, disant que (ces) deux personnes sont non seulement innocentes mais dignes des responsabilités au plus haut niveau du pays », avait ajouté l’ambassadeur Kamua.
La Cour avait réagi en réaffirmant son indépendance. L'article 16 du Statut de Rome, fondateur de la CPI, stipule que le Conseil de sécurité de l'ONU peut contraindre la Cour à surseoir aux enquêtes et poursuites durant un an, et ce de façon renouvelable, mais ne prévoit pas que le Conseil puisse obliger la Cour à abandonner définitivement des poursuites.
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© Agence Hirondelle