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Publié par JMV Ndagijimana

La situation était dramatique hier à l’est de la République démocratique du Congo, où la rébellion a poursuivi son offensive avec le soutien du Rwanda

L’offensive de rebelles menés par le général déchu Laurent Nkunda se poursuivait hier au Nord-Kivu, à l’est de la République démocratique du Congo (RDC), poussant des dizaines de milliers de civils à fuir sur les routes. Ils se dirigeaient vers Goma, la capitale provinciale, elle-même menacée de tomber aux mains des assaillants. Ont notamment repris la route 65 000 déplacés installés précédem­ment dans les camps de Kibumba et Kibati, au nord de Goma. «Plus de 1 300 personnes sont arrivées en 24 heures près de notre paroisse, ra­conte un membre de la commission Justice et Paix de Goma. Certains vieillards ont marché pendant deux jours. Ils ont dormi sans aucun abri, sous la pluie. »
Les rebelles du Congrès national pour la défense du peuple (CNDP) de Laurent Nkunda ont affronté hier l’armée congolaise qui était appuyée par des hélicoptères de la Mission de l’ONU en RDC (Monuc). Les com­bats se concentraient autour de la localité stratégique de Kibumba, à une trentaine de kilomètres au nord de Goma. Les soldats congolais refluaient hier après-midi vers le sud, accentuant ainsi le mouvement de panique des déplacés de guerre.

« C’est fini », a déclaré à l’Agence France-Presse une source militaire, précisant que l’armée congolaise allait se replier vers la localité de Minova, située entre Goma et Bukavu, la capitale du Sud-Kivu. Hier soir, le CNDP annonçait un cessez-le-feu unilatéral pour « ne pas paniquer la population de Goma ».
De nombreuses sources, tant dans les chancelleries que sur le terrain, soulignent le soutien militaire apporté par le Rwanda au CNDP, en hommes comme en matériel. Les autorités congolaises ont montré à la presse des armes, des munitions et du matériel de l’armée rwandaise présentés comme ayant été saisis sur le champ de bataille. Des tirs à l’arme lourde venus du Rwanda ont par ailleurs été observés hier à Kibumba.

Envoyé mardi à Kigali pour porter un message du président congolais Joseph Kabila, le ministre des affai­res étrangères congolais a été reçu avec dédain. Selon le quotidien officiel rwandais The New Times , le président Paul Kagame «a renvoyé un message à Kabila disant que le CNDP n’était pas le problème du Rwanda » et condamnant l’ « alliance continuelle entre le gouvernement de RDC et la milice rebelle des FDLR », les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR), formées de Hutus rwandais installés au Congo, dont certains membres ont participé au génocide de 1994.
L’ambassadeur de France à l’ONU, Jean-Maurice Ripert, a fustigé l’action de Laurent Nkunda, qu’il a accusé de « prendre la responsabilité de relancer la guerre sur une base ethnique dans l’est du Congo » . De fait, des témoignages recueillis à Goma font état de la montée d’une forte psychose à l’encontre des « rwandophones », de nationalité congolaise ou non. « Le courant ne passe plus, ni entre ethnies, ni vis-à-vis des autorités nationales et internationales », témoigne un habitant joint par téléphone. Ob­jet lundi d’une manifestation dispersée dans le sang par la police, la Monuc est en position d’accusée et ses convois reçoivent des pierres sur leur passage. Les casques bleus indiens ont aussi subi les foudres des soldats gouvernementaux qui, se retirant de la ville de Rutshuru, conquise par le CNDP, s’en sont pris mardi soir à une base de la Monuc, blessant deux casques bleus.
Critiquée pour son impuissance, la Mission de l’ONU n’avait pas obtenu mardi du Conseil de sécurité le renfort des deux bataillons d’infanterie légère ainsi que d’unités de forces spéciales et de police qu’elle demandait. Au cours d’une téléconférence, son chef, Alan Doss, avait pourtant prévenu que la mission avait « atteint ses limites » . Avec 17 000 hommes, dans un pays de la taille de l’Europe de l’Ouest, elle doit assurer la sécurité non seulement au Nord Kivu, où 6 000 casques bleus sont déployés, mais aussi plus au nord en Ituri, au Sud-Kivu, et près de la frontière ougandaise où l’Armée de résistance du Seigneur (LRA) est implantée. La Monuc est en outre affaiblie par l’annonce, lundi, de la démission de son commandant, le général espagnol Vicente Diaz ( lire La Croix du 28 octobre ). Selon nos informations, l’intérim devrait être assuré par le général sénégalais Babacar Gaye, qui venait de quitter le commandement des casques bleus.

Face à l’aggravation de la situation, le commissaire européen au développement et aux affaires humanitaires, Louis Michel, est arrivé hier à Kinshasa. La secrétaire d’État adjointe américaine chargée des affaires africaines, Jendayi Frazer, est pour sa part attendue aujourd’hui dans le pays. Le Conseil de sécurité devait se réunir de nouveau en urgence hier soir. On s’attendait à ce que la requête exprimée par le président Kabila d’une « force multinationale » pour épauler l’ONU reste lettre morte.
Toutefois, Bernard Kouchner s’est dit hier favorable au déploiement d’un « Groupement tactique » de l’Union européenne, une force de 1 500 hommes pouvant être mo­bilisée dans un délai de dix jours.
« Est-ce possible ? Pour le moment un certain nombre de pays ont refusé »,
a reconnu Bernard Kouchner. « Les Belges et les Britanniques ne veulent pas, et la France a atteint la limite de ses capacités militaires » , expli­que une source proche du dossier. L’inaction risquerait de conduire à une nouvelle internationalisation du conflit congolais. Allié indéfec­tible de Joseph Kabila, l’Angola « a déjà fait une offre de services », selon une source occidentale.

LAURENT D’ERSU

De nombreuses sources, tant dans les chancelleries que sur le terrain, soulignent le soutien militaire apporté par le Rwanda au CNDP, en hommes comme en matériel.

 

 

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