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Publié par La Tribune Franco-Rwandaise

A Orléans, 140 jeunes migrants remis à la rue.
La Croix 

 

Alors qu’une proposition de loi en cours d’examen vise à mieux protéger les mineurs placés une fois qu’ils deviennent majeurs, à Orléans, 140 jeunes devraient se retrouver à la rue au 31 août.

Il s’agit de jeunes étrangers, qui viennent d’avoir 18 ans et à qui le conseil départemental a signifié une fin de prise en charge.

  • Nathalie Birchem, 

De notre envoyée spéciale

Appelons-le Koffi. Il a quitté son pays, la Côte d’Ivoire, quand il avait 15 ans. « Avec ma famille, ça n’allait pas. Mon père travaillait dans une boulangerie, mais elle a pris feu, après il n’y avait plus assez pour payer la nourriture », explique-t-il.

Arrivé en France à l’âge de 16 ans, il est, depuis, pris en charge, comme le veut la loi pour tout mineur en situation de vulnérabilité, par l’Aide sociale à l’enfance (ASE) du Loiret, là où son statut de « mineur isolé étranger » a été reconnu. Après avoir cherché tout seul une formation, depuis septembre 2018, il a commencé un CAP de pressing. Il s’y accroche, même s’il aurait préféré le bâtiment car « comme vous dites ici, il n’y a pas de sot métier ». Il devrait être diplômé en juin 2020.

Mais cela arrivera-t-il ? En mai 2019, Koffi a reçu une lettre du conseil départemental du Loiret, dont dépend l’ASE, lui indiquant que, puisqu’il a eu 18 ans, il ne serait plus ni logé ni nourri par le département au 31 août. Et qu’il devra donc quitter l’hôtel où il est hébergé. Depuis « c’est le stress, explique-t-il. Tous les jours, je me demande comment je vais faire si je n’ai pas d’endroit où dormir ».

Comme lui, ils sont 137 jeunes selon le conseil départemental, 142 selon les associations, à se retrouver poussés dehors au 31 août. Depuis 2014, le Loiret a mis fin aux contrats jeunes majeurs, qui permettent de prolonger l’accompagnement, mais aussi le logement, des enfants placés, étrangers ou non, au-delà de 18 ans. Le département a décidé de le remplacer par une aide financière, l’allocation jeunes insertion Loiret (Ajil), sans droit à hébergement.

« La préfecture du Loiret avait accepté de prendre le relais jusqu’à ce qu’ils soient autonomes », raconte Ségolène Petit, du collectif de soutien aux jeunes isolés étrangers du Loiret (Cojie). Or, « en mai,continue-t-elle, nous avons appris que celle-ci cesserait sa prise en charge au 31 août ».Depuis, le collectif, qui a prévu d’organiser une nouvelle mobilisation dans les rues de la ville le 21 août, ne cesse de demander aux autorités une solution pour ces jeunes.

Interrogée par La Croix, la préfecture du Loiret argumente par écrit que « cette prise en charge, qui ne repose sur aucune obligation, a pour inconvénient de se faire au détriment du dispositif d’hébergement d’urgence et donc des personnes à la rue qui font appel au 115 tout au long de l’année pour être hébergées, notamment des familles avec enfants ». Le département, lui, répond, par écrit également, que « nul ne peut se satisfaire de voir des jeunes se retrouver à la rue », mais rappelle que le nombre des mineurs non accompagnés « ne cesse d’augmenter » : en 2018, 1 325 ont sollicité le département, contre 985 en 2017. Au point que le budget a grimpé à 12 millions d’euros en 2018. Il rappelle aussi que « les jeunes étrangers devenus majeurs ne relèvent plus de la compétence du département ».

Les autorités estiment donc que les jeunes, qui pour la plupart vont recevoir un titre de séjour provisoire, devront se débrouiller avec l’argent de l’Ajil. Mais, proteste Marie-Noëlle Vitry, de la Cimade, « l’Ajil, c’est 450 €. Comment voulez-vous qu’ils fassent ? Il faut qu’ils trouvent un logement, se nourrissent, s’habillent, paient leur transport et leurs affaires scolaires… »« S’ils n’ont pas d’hébergement, il y a un grand risque qu’ils abandonnent l’école et que tout leur parcours d’insertion soit détruit », complète Ségolène Petit.

Ce risque, celui que nous appellerons Larry y pense chaque jour. « Si je suis parti du Bangladesh, c’est pour venir étudier ici et avoir un avenir. » Un espoir auquel il se cramponne de toutes ses forces. Avec 16,8 de moyenne, il est le premier de sa classe de CAP agent polyvalent en restauration. « Je n’ai pas besoin d’argent, j’ai juste besoin de compléter mon diplôme pour pouvoir travailler mais si je n’ai pas d’endroit où dormir, comment faire pour aller à l’école ? »

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