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Publié par La Tribune Franco-Rwandaise

Rwanda, l’autre génocide (Prof Filip Reyntjens)

Les crimes de masse perpétrés par les troupes du FPR à l'époque du génocide des Tutsis restent impunis. Or, après un long travail d'enquête, la journaliste Judi Rever vient de démontrer qu'ils constituent un génocide contre les Hutus rwandais. Il appartient désormais à la justice internationale de poursuivre le président Paul Kagame et ses lieutenants.

Par Filip Reyntjens, professeur émérite à l'Université d'Anvers

En 1994, la minorité ethnique tutsi fut la victime d’un génocide perpétré au Rwanda par des extrémistes hutu. Des dizaines de coupables principaux furent poursuivis et condamnés par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR) et par des juridictions nationales de plusieurs pays, dont la Belgique; des centaines de milliers d’autres furent jugés par les juridictions néo-traditionnelles gacaca au Rwanda.

 L’on sait depuis de nombreuses années que la rébellion à prédominance tutsi, le Front patriotique rwandais (FPR), a lui aussi commis des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre avant, pendant et après le génocide. Ces faits ont été établis par des rapporteurs des Nations Unies, des ONG, des chercheurs et des journalistes. Alors que le TPIR était compétent pour juger ces crimes, pas un seul suspect du FPR ne fut poursuivi. Cette « justice des vainqueurs » devint possible, parmi d’autres raisons, parce que le FPR, qui prit le pouvoir en 1994 et dirige le Rwanda encore aujourd’hui, fut protégé par Washington et Londres. Paul Kagame, le leader du FPR pendant et après la guerre civile et président du Rwanda depuis 2000, est considéré comme un « visionnaire » par des amis influents comme Bill Clinton et Tony Blair. Tandis qu’il gouverne par la terreur, il est loué pour ses performances économiques et une bonne gouvernance bureaucratique. En même temps, la situation des droits humains continue à être désastreuse et la gestion dictatoriale profondément enracinée.

 Alors que les crimes de masse perpétrés par le FPR sont restés impunis, la journaliste d’investigation canadienne Judi Rever vient de démontrer que le mouvement de Kagame a commis un génocide contre les Hutu (In Praise of Blood. The Crimes of the Rwandan Patriotic Front, Random House Canada, mars 2018). Se basant sur des dossiers jusqu’ici secrets du TPIR, d’autres documents et de nombreux entretiens avec d’anciens officiels civils et militaires du FPR, elle montre de manière détaillée comment des femmes et des hommes, des enfants et des vieillards hutu furent massacrés à très grande échelle. La cruauté infligée aux victimes rappelle tragiquement celle appliquée aux Tutsi. L’« intention de détruire, en tout ou en partie, le groupe ethnique hutu, comme tel », comme le veut la convention sur le génocide, est clairement établie. Le nombre de victimes ne peut être précisément estimé, mais le bilan semble bien être de centaines de milliers. Rever identifie vingt leaders du FPR, dont Kagame lui-même, comme auteurs de ces atrocités.

 S’ajoutant à ce qui était connu depuis longtemps, ces constats accablants ne peuvent plus être ignorés. Kagame peut-il continuer à être honoré par les meilleures universités de par le monde, recevoir un traitement tapis rouge partout où il va, être un hôte régulier au Forum de Davos, présider l’Union Africaine ? Au contraire sa place, ainsi que celle de ses lieutenants, est devant un tribunal, face à la justice en raison de ses crimes pour encourir la peine qu’il mérite. La plupart des Rwandais, Hutu et Tutsi, sont pleinement conscients de ce passé tragique. Si la vérité n’est pas dite, le pays ne trouvera pas la réconciliation dont il a un besoin urgent.

 *Filip Reyntjens

Professeur émérite à l’Université d’Anvers

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C
Professeur Reintjens reconnaît pour la première fois que les crimes qui ont été commis par les soldats du FPR sur ordre de Kagamé contre les Bahutu sont constitutifs de génocide même s'il se contredit ensuite.<br /> En effet, il fait sommairement la distinction entre les crimes de masse qui ont été commis par les FPR contre les Hutu et ceux qui ont été commis contre les Tutsi. Les premiers sont, selon lui, constitutifs de génocide et les seconds, sont constitutifs de crime de guerre et crimes contre l'humanité.<br /> Au vu de l'ensemble de ses dires F.Reintjens a du mal à s'incliner devant la VERITE. <br /> En somme, Professeur qu'il est, au regard des énormités qu'il a commises relativement au drame rwandais et à savoir ses écrits, truffés de grossièretés, d'affirmations inexactes, parcellaires et approximatives dont il a fait avaler à ses étudiants, il ne veut pas se remettre en cause (voir ses livres et son dernier Que sais-je). C'est regrettable. <br /> Judi Rever vient de déconstruire toutes ses affirmations colportées à grande échelle par lui via les médias dont RFI. Force est de constater qu'il n'a déconstruit aucune des affirmations de Judi Rever. En proférant sciemment des affirmations dont il ne dispose pas de sources et conséquemment non vérifiées et non vérifiables, Professeur Reintjens s'est lui-même discrédité.<br /> Exemple: aucun professeur de droit digne de ce nom ne peut soutenir qu'un directeur de cabinet du ministre de la défense a planifié le génocide des Batutsi dans deux heures et reconnaître en même temps que les massacres contre ces derniers sont la conséquence inéluctable de l’assassinat du Président Habyarimana. Par ailleurs, même à supposer que cette planification ait existé, elle est nécessairement antérieure à la commission des crimes contre les Batutsi et conséquemment, ses auteurs sont ceux qui dirigeaient en droit et en fait le Rwanda, à savoir Nsengiyaremye et Uwilingiyimana, pro-FPR notoire et Iyamuremye Augustin, directeur général du service de renseignement intérieur, un des piliers majeurs du gouvernement d’opposition alliée du FPR et membre effectif et notoire de celui-ci. Sachant que ce dernier a lui-même dit publiquement qu’il agissait pour le compte du FPR et qu’il était en contact permanent avec Kagame et Rutaremara.<br /> Filip Reintjens qui a chargé Colonel Bagosora n’a jamais expliqué comment dans un Rwanda qu’il connaît au demeurant car il fut l’auteur des codes et lois du Rwanda, un directeur de cabinet du ministre de la défense a planifié et fait exécuter le génocide sans que Iyamuremye et partant Kagame, espion de profession, ne soit au courant. Dans l’Affaire Général Munyakazi, Iyamuremye, appelé à la barre en qualité de témoin à décharge a dit en substance qu’il n’a jamais entendu parler de planification du génocide de qui que ce soit et que si celle-ci avait existé, il en aurait en tout état de cause au courant. Reintjens outre qu’il n’a jamais produit les preuves de ses affirmations, personne n’a entendu ses explications d’expert du Rwanda sur un élément capital : Iyamuremye a été directeur général du service de renseignement intérieur d’avril 1992 au 4 juillet 1994. Il n’a jamais désapprouvé publiquement les actions des gouvernements successifs de Nsengiyaremye à Kambanda. Il était dès lors associé à toutes les décisions qui ont été prises par ces premiers ministres dont la planification du génocide des Batutsi, évoquée par Professeur Reintjens. Pourtant, il ‘n a jamais été inquiété outre mesure par le régime Kagame alors que plusieurs fonctionnaires de toute catégories ont été exécutés, croupissent en prison pour une prétendue planification et exécution du génocide dit des Batutsi. Au contraire, il a été récompensé par Kagame. Reintjens n’a jamais expliqué comment Kagame a récompensé un directeur général du service de renseignement intérieur du Rwanda qui occupait un poste de haut rang dans les gouvernements ci-dessus indiqués, qualifiés de gouvernement de génocidaires. Aussi, sur l’attentat contre l’avion du Président Habyarimana, il a disserté sur tout et rien, mais force est de constater qu’il a observé le silence de tombeau sur la présence de l’avion espion belge qui était derrière l’avion du Président Habyarimana à l’heure et jour de l’attentat et dont les pilotes ont nécessairement vu l’endroit du tir des missiles car cet avion était équipé de système anti-missile. Enfin le ministre des affaires étrangères d’alors Anastase Gasana a refusé de remonter dans l’avion du Président Habyrimana pour rentrer au Rwanda alors qu’il y était à l’aller. Ce refus signifie qu’il était nécessairement au courant de l’attentat qui devait emporter le Président Habyarimana et tous passagers de son avions en sus des membres d’équipage. Il en est de même du Premier Ministre Agathe Uwilingiyimana . Reintjens le sait car en sa qualité d’expert du Rwanda il ne peut prétendre l’ignorer. Or, ce point n’est mentionné nul par dans ses livres et déclarations publiques aux radios et télévisions.<br /> Ce qui est intéressant c’est que Professeur Reintjens a lu le livre de Rever Judi. J’espère qu’il en est de même du livre de Ntililkina Faustin, officier de l’AR à l’Etat major à la date des faits. Il décrit avec une parfaite précision comment Kagame a déclenché une guerre généralisée sur l’ensemble du Rwanda et les posions des parties en cause dans la guerre contre le Rwanda en 1994.<br /> S’il est professeur digne de ce nom, pour son honneur et dans l’intérêt de ses étudiants, il faut espérer que le livre de Judi Rever le conduira à observer la rigueur attendue chez tout professeur de droit en l’occurrence : s’incliner devant la Vérité et reconnaître publiquement ses erreurs.<br /> Sur le drame qui a endeuillé et endeuille toujours notre pays et le Peuple Rwandais, le problème majeur est que ceux qui prétendent d'être défenseurs des Batutsi dénient les Hutu le droit absolu d'exprimer leur souffrance morale consécutive aux pertes des leurs qui ont été massacrés par les soldats du FPR sur ordre de Kagamé, le droit d'honorer leur mémoire, le droit de prier pour les défunts, le droit pour les enfants de victimes de dire publiquement ou expressément qu'ils sont orphelins. Ces mêmes prétendus défenseurs des intérêts des Batutsi int irrévocablement de reconnaître les crimes qui ont été commis contre des millions de Hutu, femmes, enfants et hommes de tous âges et conditions. Des veuve, veufs et orphelins de victimes de Kagamé sont exclus des aides publiques prévues par la constitutions au seul motif qu'ils sont Hutu, frappés d'interdiction d'évoquer leur qualité des rescapés. L'exclusion des Hutu dans divers structures publiques du Rwanda aggrave ce problème de division des Rwandais en deux catégories, les Rwandais de première catégorie qui ont droit à tout et les Rwandais de seconde zone, qui n'ont droit à rien.<br /> Professeur Reintjens font une confusion entre la croissance à 7% voir plus des portefeuilles des maitres du Rwanda et la croissance imaginaire du portefeuille des Rwandais c'est-à-dire de l'Etat Rwandais. La preuve de la croissance de la prétendue gestion Kagamé n'a jamais été prouvée par qui que ce soit. La paupérisation de la masse populaire est flagrante. Comme l'a dit à juste titre Kagamé, si l'homme peut cacher ce qu'il a dans sa poche, il ne peut nullement cacher la misère qui le frappe. Il serait intéressant que Filip Reintjens vienne ici rencontrer des millions de jeunes actifs qualifiés et non qualifiés frappés massivement de chômage, des enfants de rue appelés déchets par Kagamé, voir l'opulence dans laquelle vivent les maîtres du Rwanda, la ségrégation sociale et spatiale flagrante ici au Rwanda de Kagamé, des ingénieurs, des docteurs en sciences et autres domaines qui croupissent en prison non pas parce qu'ils ont commis des crimes contre qui que ce soit parce qu'ils sont en liberté dans ce pays, ils peuvent constituer une menace pour le régime des kleptocrates, voir la division en deux catégories de l'école rwandaise: une école de enfants de chefs et d'oligarques du régime et une école des enfants du Peuple ou l'école poubelle dans laquelle grouillent les enseignants qui parlent l'anglais approximatifs appris dans le cour du soit ou l'anglais de citadins de Kampala, Nairobi et autres villes anglophones. Lors de sa encontre avec les fonctionnaires de son régime, Kagamé a reconnu publiquement le bilan macabre de sa gestion à tel point qu'il a demandé aux détenteurs de doctorats où ils les obtenus et où ils sont. Le détournement massif des deniers pblics en toute impunité par Kagamé et les siens n'est pas à prouver. Sont exhibés sur les télévisions les fonctionnaires de petits calibres qui piquent dans les caisses publiques pour terminer le fin du mois , dans un Rwanda marqué par l'inflation de plus de 600%. Kagamé a envoyé en prison Diane Rwigara, candidate à l'élection présidentielle parce qu'elle a démasqué Kagamé quant à sa pseudo gestion , secteur par secteur. Demander la débat sur la gestion de Kagamé est constitutif d'un crime contre l'Etat. C'est ce crime qu'a commis Diane Rwigara. Si cette croissance économique du Rwanda de Kagamé criée sur les toits existe, elle est alors irréfutable. Se poser alors la question de savoir pourquoi Kagamé a criminalisé la demande de débat sur cette croissance visible, selon lui et les ignorants. Sur les assassinats des avocats sur ordre de Kagamé, personne n'a entendu le commentaire de Reintjens.
L
Cher César,<br /> Votre lecture des publications du professeur Filip Reyntjens mérite d'être revue. En effet il est un des rares spécialistes et juristes occidentaux qui a toujours eu le mérite de se placer au dessus de la mêlée pour analyser la situation rwandaise sans prendre partie ni pour un camp ni pour un autre. Il a toujours dénoncé les crimes commis contre les peuples de la région des grands lacs, quels qu'en soient les victimes ou les auteurs. Qu'il ait mis du temps à reconnaitre comme beaucoup d'entre nous le caractère génocidaire des crimes commis contre les Hutu du Rwanda est compréhensible dans le contexte international que nous connaissons. La bonne attitude devrait être, selon nous, prendre acte de toute contribution ou initiative visant à faire mieux connaître la véritable histoire de notre pays plutôt qu'à vilipender les chercheurs honnêtes comme Filip Reyntjens.<br /> <br /> La rédaction de TFR