Mali-Algérie : point de situation et éléments de réflexion (Bernard Lugan)
Analyse de Bernard Lugan - 17 janvier 2012
L’intervention française au Mali conduit à quatre grandes réflexions :
1) Compte tenu des réalités frontalières, l’action de la France ne peut réussir que si l’Algérie la soutient. Or, la prise d’otages d’In Amenas, site stratégique hautement protégé, montre soit qu’Alger ne contrôle pas son territoire, soit que les islamistes ont des complicités au plus haut niveau de l’appareil sécuritaire d’Etat. Dans les deux cas, les conséquences pour l’opération Serval sont de la plus haute importance.
2) Nous payons aujourd’hui au prix fort la politique de désengagement initiée sous Jacques Chirac puis amplifiée sous Nicolas Sarkozy à savoir, fermeture de bases et abandon de ces irremplaçables implantations qui étaient nos yeux et nos oreilles.
3) La place laissée libre par la France fut prise par les Etats-Unis qui investirent de gros moyens, notamment au Mali. Ignorant la tectonique ethno-raciale sahélienne, ils y formèrent des cadres qui désertèrent au mois de janvier 2012 et contre lesquels nos soldats sont aujourd’hui engagés.
4) Ceux qui ont lancé la guerre contre le colonel Kadhafi étaient des irresponsables et je n’ai cessé de le dire depuis le premier jour. Outre qu’ils ont provoqué une réaction déstabilisatrice en chaîne, ils ont armé les jihadistes. Il faut en effet savoir que certaines des armes aujourd’hui utilisées contre nos soldats proviennent de nos propres arsenaux et qu’elles furent généreusement parachutées aux « démocrates » libyens chers à BHL.
Ceci étant, quelle est la réalité de la situation ?
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Analyse de Bernard Lugan (20 janvier 2013)
Ce n’est pas le seul Mali qui doit être sécurisé, mais tout le Sahel, ce rift racial s’étendant sur dix pays et sur lequel ont été plaqués des Etats associant artificiellement des Nord « blancs » et des Sud noirs.
L’Europe feint de ne pas voir ce qui s’y passe cependant que les Etats-Unis observent la situation de loin. Le 18 janvier Léon Panetta secrétaire américain à la Défense a ainsi déclaré que « les opérations de sécurité au Mali incombent aux puissances régionales ». Quant à l’ « aide » à l’armée française, parlons-en, puisque Washington va en effet louer à la France ces avions gros porteurs qui lui font régulièrement défaut. Léon Panetta a bien pris soin de préciser, au cas où il n’aurait pas été compris, que le « gouvernement français remboursera aux Etats-Unis les frais entraînés par ce soutien aérien». François Hollande doit se dire qu’il est réconfortant de pouvoir compter sur de « solides » alliés…
Quant aux pays africains, pourtant les premiers concernés, ils ne se bousculent pas. De plus, les contingents que certains finiront tout de même par envoyer et qui seront équipés par la France, ont une valeur militaire « inégale ».
Dans ces conditions, et comme la France ne peut, à elle seule, s’engager dans une opération de « pacification » du sahélistan, que convient-il donc de faire et surtout, de ne pas faire ?
Afrique Réelle.