Harcèlement des réfugiés rwandais en France
Par Jean-Marie Ndagijimana
La fiche du Ministère français des Affaires étrangères sur le Rwanda a été actualisée pour la dernière fois le 22 mai 2009. Pourtant l'actualité franco-rwandaise - notamment judiciaire - n'a jamais été aussi riche. Le dernier cas en date concerne l'affaire Rwamucyo où une drôle d'infirmière googliste a servi de porte-flingue à Alain Gauthier et à ses parrains officiels français et rwandais. La version des faits tendant à nous faire croire qu'une infirmière contrariée aurait servi la Justice en dénonçant un médecin hutu présumé génocidaire est aussi rocambolesque que grotesque.
Soupçonné donc coupable !
Si on suivait la logique empruntée par le directeur de l'hôpital de Maubeuge qui a mis fin au contrat du Docteur Rwamucyo sans tenir compte du principe sacro-saint de la présomption d'innocence, plusieurs députés, maires, sénateurs, officiers supérieurs et autres officiels français accusés par le pouvoir de Paul Kagame de complicité de génocide devraient immédiatement démissionner de leurs postes.
Sous réserve des décisions judiciaires à intervenir quant au fond, il est évident que la procédure utilisée par l'employeur du Docteur Rwamucyo pour "vider" ce dernier n'est pas acceptable car contraire à tous les principes du droit français. Elle est le fruit d'une manipulation médiatique digne des républiques bananières et inimaginable dans d'autres démocraties européennes. Elle met néanmoins au grand jour les harcèlements incessants et les injustices que subissent de nombreux réfugiés Hutu soupçonnés globalement d'être des génocidaires et sont traités comme des sous-hommes dans la Patrie des droits de l'homme.
A part cette affaire, tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes entre Kigali et Paris depuis la levée du contrôle judiciaire du Colonel Rose Kabuye accusée d'assassinat et de participation à un attentat terroriste ayant causé la mort de trois ressortissants français. Là au moins, le principe de présomption d'innocence a prévalu. Deux poids deux mesures ?
Autre sujet de satisfaction révélé par le contenu de la fiche Rwanda du site www.diplomatie.gouv.fr : enfin Bernard Kouchner reconnait que la Mission Turquoise est allée au bon endroit au bon moment et qu'elle a sauvé des milliers de citoyens rwandais, toutes ethnies confondues. Rappelons ici que jusqu'à la veille du 21 juin 1994, Washington, Londres et Bruxelles ont tout fait pour empêcher ou retarder l'intervention des troupes franco-africaines de Turquoise. Au lieu de demander des comptes au Royaume Uni et aux Etats-Unis d'Amérique (Bill Clinton), une certaine opinion soutenue, pour d'obscures raisons, par un groupe d'officiels français accuse le gouvernement de Mitterrand-Balladur de complicité de génocide.
Parlant de l'intervention française au Rwanda, des personnalités françaises de premier plan l'ont qualifié d'erreur politique, alléguant que Turquoise avait permis à des génocidaires de fuir la justice. La France serait-elle donc, aux yeux de certains, coupable d'assistance à peuple en danger ?
Entre le tandem UK-US qui, en 1994, scandait "Ne parlez surtout pas de génocide! Laissez les Rwandais s'étriper", et le gouvernement Mitterrand-Balladur qui réclamait sans relâche l'intervention de la communauté internationale pour arrêter le génocide, qui devrait-on accuser de complicité de génocide par inaction coupable? Sans hésitation les premiers.
Paul Kagame a sacrifié les Tutsi, cela n'est plus un secret pour personne. Le choix de la France comme bouc-émissaire idéal devant expier tous les péchés du génocide rwandais permet de masquer les responsabilités personnelles de Paul Kagame, le président rwandais actuel, et de ses alliés dans ce qui est considéré comme le plus grand génocide africain de tous les temps.
Copyright France-Rwanda Tribune
Fiche Rwanda sur http://www.diplomatie.gouv.fr
Brève
Quinzième anniversaire du génocide au Rwanda (7 avril 2009)
Déclaration de Bernard Kouchner
"En ce quinzième anniversaire du génocide des Tutsis au Rwanda mes pensées vont au peuple rwandais qui n’oubliera jamais les atrocités commises au nom de la haine et de la négation de l’autre. Je mesure son infinie tristesse en ce jour de mémoire.
Je pense aux centaines de milliers de victimes d’une haine irrationnelle, qui a également touché les Hutus qui n’acceptaient pas cette politique génocidaire, ainsi qu’à leurs familles et à leurs proches."
Dans les années 90, la France s’est investie dans les efforts de la communauté internationale pour tenter d’enrayer la montée des tensions dans ce pays, qui avait déjà connu de graves violences intercommunautaires au cours des années 70.
Le génocide de 1994 a provoqué une onde de choc dans le monde entier. En juin 1994, face à l’accélération des événements sur le terrain et à la division du Conseil de sécurité sur le renforcement de la force de maintien de la paix au Rwanda (MINUAR), la France a été le premier pays à dénoncer le génocide, et a proposé à l’ONU la mise à disposition de son propre contingent pour mettre en place, avec sept pays africains, une opération humanitaire.
L’opération Turquoise, d’une durée de deux mois conformément au mandat du Conseil de sécurité, a ainsi été la seule opération humanitaire d’ampleur engagée pour sauver les populations menacées. Le 4 juillet, la France a mis en place une zone humanitaire sûre, afin de mettre les populations à l’abri des combats qui faisaient rage dans le Sud (Butare) et dans l’Ouest (Kibuye) du pays.
Cette opération n’a pas été en mesure d’empêcher tous les massacres, notamment dans les premiers jours de sa mise en place, mais elle a permis à des milliers de personnes d’échapper aux combats et à des centaines de milliers de personnes déplacées de bénéficier de secours et de soins.
Le travail effectué en 1998 par la mission parlementaire d’information sur les opérations militaires menées au Rwanda par la France, présidée par M. Paul Quilès, a consisté en un effort de vérité, mené de manière approfondie sur la politique de la France au Rwanda à cette époque. Il a restitué toute la complexité des facteurs qui ont mené à la tragédie d’avril 1994.
Le dialogue avec le Rwanda a ensuite été régulier, notamment en vue de l’instauration d’une paix durable dans la région des grands lacs (visite conjointe franco-britannique des ministres des affaires, M. Védrine et M. Straw à Kigali le 22 janvier 2002, visite de M. de Villepin à Kigali en septembre 2002, visite de M. Muselier à Kigali en avril 2004, entretien entre M. Michel Barnier et son homologue rwandais, M. Charles Murigande, le 28 juillet 2004 à Prétoria ; entretien entre M. Douste-Blazy et M. Murigande à l’occasion du sommet Afrique-France en juin 2005 et de l’assemblée générale des Nations Unies en octobre 2006) ; visite d’une mission des sénateurs français en juin 2006.
Le Rwanda a décidé le 24 novembre 2006 de rompre ses relations diplomatiques avec la France, à la suite des conclusions d’une procédure judiciaire menée par le juge français Jean-Louis Bruguières sur plainte des familles de l’équipage français de l’avion du Président rwandais Habyarimana, abattu en avril 1994.
Les plus hautes autorités françaises (Président de la République et Ministre des affaires étrangères) ont manifesté à plusieurs reprises leur volonté de renouer au plus vite des relations diplomatiques. Les gestes d’ouverture de la France ont reçu un accueil favorable de la part des autorités rwandaises avec lesquelles un dialogue direct a pu être rétabli (entretiens du Président de la République avec le Président Kagamé à l’occasion du sommet UE/Afrique de Lisbonne en décembre 2007, et à New York en septembre 2008 ; déplacements à Kigali du Ministre des affaires étrangères et européennes, B. Kouchner, en janvier et novembre 2008). Le dialogue se poursuit en vue de permettre une normalisation des relations entre nos deux pays.
Mise à jour : 22.05.09