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Publié par JMV Ndagijimana

Alors que les combats font rage dans l’est de la RDC entre les troupes pro-rwandaises de Laurent Nkunda et les troupes régulières, un second front s’est ouvert plus au nord, dans la province de l’Ituri, limitrophe de l’Ouganda

BUNIA (République démocratique du Congo)

«C’est comme s’ils étaient tombés du ciel», remarque le personnel de la Mission d’observation des Nations unies au Congo (Monuc), à Bunia, dans le nord-est du pays. Après avoir dépensé des millions de dollars pour désarmer les milices que le Rwanda et l’Ouganda ont armées durant la dernière guerre, les casques bleus reconnaissent avoir été surpris par l’offensive lancée fin septembre par un groupe de miliciens jusqu’alors inconnu.

Une offensive bien préparée. Les milices, principalement constituées des anciens combattants du Front de résistance patriotique de l’Ituri (FRPI), ont pris plusieurs localités. Et quand l’armée régulière, escortée par les casques bleus, a tenté de les repousser, elle a été prise dans une série d’embuscades et perdu ses munitions ainsi que des caisses d’uniformes… Les hélicoptères de la Monuc en patrouille de reconnaissance ont même, par deux fois, essuyé des tirs.

En ville, la population ne sait plus à qui faire confiance. Quand la rumeur a couru, vendredi dernier, que les miliciens étaient aux portes de Bunia, toutes les boutiques ont fermé. Chacun courait chercher un abri. Sans la présence de la Monuc qui a décidé d’approvisionner les troupes régulières en nouvelles munitions, en carburant et en vivres, les miliciens auraient probablement pris la ville.
«Les forces armées régulières ont sollicité la Monuc pour repousser les miliciens FRPI et leurs alliés, car ils ont des alliés. Ces gens du Front populaire pour la justice au Congo (FPJC), personne ne les connaît.

Il y a quelqu’un qui nous a téléphoné le 1 er octobre. Il s’est dit commandant en chef. Il s’appelle Sharif Manda. Il fut le chef du Front des nationalistes et intégrationnistes (FNI) en Ituri. Il nous a présenté la structure de son nouveau groupement», dit-on encore à la Monuc.


Plus de 40 000 personnes ont dû fuir leurs maisons et errent sur les routes. Une catastrophe humani­taire jugée d’autant plus inquiétante qu’elle intervient dans la foulée de la déclaration de guerre lancée début octobre par les rebelles de Laurent Nkunda, qui a lui aussi annoncé la création d’un nouveau mouvement armée : le Front pour la libération totale du Congo. Laurent Nkunda tente depuis des années de soustraire les régions frontalières avec le Rwanda du contrôle de Kinshasa. Il a relancé son offensive militaire le 28 août dernier et, là encore, les casques bleus de la Monuc ont dû intervenir pour empêcher la prise de la province du Nord-Kivu. La concomitance entre la reprise des combats dans les Kivus et dans la province de l’Ituri, plus au nord, n’est peut-être pas une coïncidence.
Pour maintenir la paix dans cette vaste région, la mission des Nations unies fonctionne à l’aveuglette. Ses 16475 hommes, issus de 18 pays, pour la plupart non francophones, ont du mal à communiquer entre eux et avec la population. Les États-Unis ont systématiquement refusé qu’ils se dotent de services de renseignement propres. La Monuc n’a pas les équipements nécessaires pour contrôler les lacs limitrophes de la RDC, du Rwanda et de l’Ouganda. Elle n’a pas de matériel de contrôle nocturne… Des faiblesses qui font la force de ces milices, qui peuvent en toute impunité passer du Congo au Rwanda et en Ouganda.

À Bunia, l’armée régulière est d’ailleurs convaincue que les milices du FPJC s’approvisionnent en armes depuis l’Ouganda voisin. La plupart des territoires pris par elles se situent en effet le long de la frontière ougandaise, au sud du lac Albert. Il s’agit d’une zone de prospection pétrolière très sensible pour l’Ouganda, qui y a déployé depuis longtemps son armée. Il est donc peu probable que l’armée ougandaise n’ait pas été au courant de telles livraisons d’armes. Pourtant, le gouvernement ougandais nie tout lien avec ces nouvelles milices.

Le silence du gouvernement ougandais sur ces combats qui se déroulent à sa frontière est d’autant plus étonnant que l’Ouganda a gardé une emprise sur la politique locale dans l’est de la RDC, notamment à travers des réseaux commerciaux mafieux liés à l’exploitation des mines d’or et du bois. Les habitants de Bunia craignent que l’Ouganda ne soit bien à l’origine de ce nouveau front.
ADRIEN DE MUN

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