ODHR - Disparition forcée du journaliste Théoneste Nsengimana
Observatoire des droits de l’homme au Rwanda –
Email : observatoire.odhr2018@gmail.com
Téléphone : +33771403840
Paris le 03 juin 2024
DECLARATION N°07/2024 – Harcèlements continu du Journaliste Théoneste Nsengimana - Disparition forcée en prison du journaliste et harcèlement de son épouse Umwali Chantal et de sa famille.
- Disparition forcée du Journaliste Théoneste Nsengimana
Des informations provenant des proches du journaliste Théoneste Nsengimana et d’autres sources informées, l’ODHR a appris que ce journaliste d’Umubavu TV en détention à la prison de Mageragere depuis bientôt trois ans est introuvable. Certaines informations à l’intérieur de la prison indiquent que, menotté, il a été emmené et déplacé dans un lieu qui est pour le moment inconnu. Son épouse Umwali Chantal qui a amené ses enfants lui rendre visite à la prison de Mageragere sans succès le 03 juin 2024 s’inquiète sérieusement de sa disparition. La dernière fois qu’elle a pu lui rendre visite et lui parler est samedi le 25 mai 2024. Durant le moment court d’entretien avec son mari en détention, il lui aurait glissé que les responsables de la prison allait, le faire mourir de faim. Ce jour-là il y avait beaucoup d’agents de sécurité contrairement à la situation habituelle. Quelques jours plus tard, les codétenus ont signalé sa disparition forcée.
Samedi le 1er juin 2024, jour de visite habituelle, les enfants ont attendu en vain leur père et sont rentrés, vers 17 heures après plus de 7 heures d’attentes, avec les provisions qu’ils lui avaient apportées. Le 02 juin 2024, un dimanche jour de visite spéciale des enfants, Mme Chantal et son enfant ont attendu en vain le visage de leur père/mari. Ils étaient là à attendre de 09H00 à 15H00. Elle a demandé s’il n’est pas autorisé à être visité pour qu’ils ne restent pas là à attendre pour rien. Les services l’ont fait balader en lui disant de voir tel ou un tel au bureau de direction, lui aussi le renvoyant à son tour à un autre agent sur terrain mais sans réponse concernant la visite à son mari. Avec son enfant, elle est rentrée inquiète pour son mari injoignable dans une prison de haute sécurité de Mageragere. Cette inquiétude a été exprimée en ligne sur une chaine YouTube ((3) Avuye Mageragere/Biteye ubwoba ibitangajwe n’umuryango w’umunyamakuru Theoneste Nsengimana - YouTube) et dans une lettre datée le 03 juin adressée au responsable de Rwanda Correctional Service (RCS). Dans cette lettre elle indique que lors des visites des proches du journaliste ils n’ont pas été autorisés à le voir et qu’elle avait des appréhensions à la suite des informations qu’il aurait été emmené de manière brutale vers un lieu inconnu. Elle attend sa réponse.
Toutes les sources alertent sur la disparition du Journaliste Théoneste Nsengimana. Certains ont cru que c’était un refus simple de la visite. Mais ils craignent que le journaliste disparaisse de manière forcée comme ce fut le cas de l’opposant Boniface Twagirimana. Ils font la relation de cette disparition à une lettre de Théoneste Nsengimana exprimant son souhait de poser sa candidature aux élections présidentielles de juillet 2024. Cette lettre simple et écrite à la direction de la prison de Nyarugenge le 30 avril 2024 pour lui demander l’autorisation d’aller collecter les signatures n’a jamais eu de réponse favorable ou défavorable selon Umwali Chantal.
Pour rappel, le journaliste Théoneste Nsengimana est propriétaire de la chaine en ligne Umubavu TV est constamment harcelé par le biais de sa famille. On sait qu’il a été arrêté le 13 octobre 2021 et que son procès ne connaît pas encore son début de commencement. Sa dernière comparution pour une audience sur la procédure de détention a eu lieu en mars 2021.
Quant à l’audience sur le fond, elle n’a jamais été ouverte et personne n’en connait la date. Il a été arrêté en même temps que les membres du parti Politique Dalfa Umurinzi non encore encre reconnu de Mme Victoire Ingabire Umuhoza. Le régime de Kigali dirigé par le FPR n’a jamais manifesté une quelconque intention de l’enregistrer depuis sa création.
L’ODHR avaient alerté sur l’arrestation du journaliste avec les membres de ce parti dans sa Déclaration N°12/2021 - Note d’alerte sur des atteintes aux libertés d’expression et d’opinion du 29 octobre 2021 (voir ob_ecca0b_odhr-declaration-n-12-alerte-sur.pdf (over-blog-kiwi.com). Les membres de ce parti arrêtés dans la même affaire sont : Sylvain Sibomana, Alexis Rucubanganya, Hamad Hagengimana, Jean-Claude Ndayishimiye, Joyeuse Uwatuje, Alphonse Mutabazi et Marcel Habimana ainsi qu’Emmanuel Masengesho. « Lors de leur arrestation pour suspicion de publication de fausses rumeurs, ils préparaient la célébration d’Ingabire Day le 14 octobre 2021 » et Nsengimana Théoneste prévoyait couvrir cet évènement.
Des alertes avaient été aussi lancées sur la torture et les mauvais traitements qu’ils subissaient dans la prison de Mageragere, selon le rapport mondial de HRW 2024 (Rapport mondial 2024: Rwanda | Human Rights Watch (hrw.org).
Ce refus de visite pour les membres de sa famille et pour son avocat concorde avec les signalements de tortures et les alertes de disparition forcée.
L’ODHR demande aux autorités rwandaises de garantir la sécurité du journaliste Théoneste Nsengimana et de lever le doute sur sa disparition et d’autoriser les visites des proches. L’Etat devrait cesser de harceler et de torturer le journaliste en détention et ses proches inquiets à cause de cette situation.
2. Harcèlement de l’épouse et les proches du journaliste Théoneste Nsengimana
Mme Chantal UMWALI épouse du journaliste condamnée à une amende de trois millions (3.000.000 FRW) de francs rwandais avec son coprévenu Ihorahabona Jean de Dieu pour avoir tenté de rendre visite à son mari en prison.
Dans le jugement RP 00412/2023/TGI/GSBO rendu le 30/04/2024 par le Tribunal de Grande Instance de Gasabo, son épouse Chantal Umwali est accusée avec son coprévenu Ihorahabona Jean de Dieu de faux et usage de faux prévu par code pénal rwandais dans son article 276 de la loi N°68/2018 du 30/08/2018. Ils sont accusés de s’être concerté en date du 04/11/2022, pour aller à la prison de Mageragere rendre visite au journaliste Nsengimana Théoneste en détention pour suspicion d’incitation à la division, d’association de malfaiteurs et de répandre des informations fausses. Ils sont aussi accusés d’avoir utilisé/contrefait un message de résultat d’examen Covid 19 reçu de RBC par IHORAHABONA Jean de Dieu. Elle aurait plaidé coupable pour ce fait lors de sa comparution pour l’interrogatoire lors de l’instruction du dossier. Umwali Chantal aurait justifié ce faux et usage de faux au parquet qu’elle n’avait pas les moyens lui permettant de se payer les examens de covid19 pour pouvoir rendre visite à son mari.
Quant à Ihorahabona Jean de Dieu, le juge a fondé sa décision sur le fait qu’il aurait plaidé coupable au Parquet et qu’il aurait nié les faits devant le juge en soulignant qu’il aurait été terrorisé par la police qui l’a contraint à plaider coupable.
Ils ont tous été condamnés à payer chacun une amende de trois millions de francs (3.000.000 FRW) et les frais de dix mille francs rwandais (10.000 FRW) pour Umwali Chantal seule. Le juge justifie l’exemption de frais de justice pour Ihorahabona Jean de Dieu par le fait il était en détention.
L’ODHR est préoccupé par cette disparition du journaliste Théoneste Nsengimana dans la prison de Mageragere sous contrôle des services étatiques. C’est vraiment inquiétant lorsqu’on sait ce qui s’est passé avec la disparition forcée de Boniface Twagirimana et des actes de tortures commis dans les prisons rwandaises comme le soulignent les procès en cours des anciens responsables de la prison de Rubavu.
L’ODHR est préoccupé par la condamnation d’Ihorahabona Jean de Dieu sur la base des preuves qu’il estime lui avoir été extorqué par la terreur policière. L’ODHR s’inquiète aussi de la famille du journaliste Théoneste Nsengimana persécutée parce qu’elle tente à tout prix de suivre sa situation en prison et de le défendre.
L’ODHR alerte les organisations de protection des journalistes et de défense des droits humains ainsi que les missions diplomatiques et d’autres partenaires faisant le plaidoyer pour le respect des droits humains d’intervenir en faveur de la famille de leur compagnon victime de sa profession et de son combat pour la liberté d’expression et pour le droit d’informer.
Pour la coordination de l’ODHR
Munyandilikirwa Laurent
Président