Après dix ans d’absence, l’ancien président ivoirien lance un nouveau parti « panafricain de gauche ».

Le Monde avec AFP

Publié aujourd’hui à 17h35, mis à jour à 18h04 

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Une affiche de l’ancien président Laurent Gbagbo, avant le début d’un meeting pour le lancement de son nouveau parti politique, à Abidjan, en Côte d’Ivoire, le 16 octobre 2021.

Laurent Gbagbo est de retour. L’ancien président ivoirien, revenu au pays depuis juin après près de dix ans d’absence, lance un nouveau parti politique « panafricain de gauche », samedi 16 et dimanche 17 octobre, avec l’élection présidentielle de 2025 en ligne de mire.

« C’est le grand retour de Laurent Gbagbo sur la scène politique », assure Justin Koné Katinan, porte-parole de l’ancien chef de l’Etat. « C’est un événement majeur qui fera sans aucun doute date dans l’histoire politique de la Côte d’Ivoire », a lancé à la tribune du congrès Georges Armand Ouégnin, président du comité d’organisation de l’événement, évoquant « un nouveau départ » pour M. Gbagbo qui doit s’exprimer dimanche.

Tee-shirts, bobs, pagnes, écharpes… L’effigie de l’ancien président était partout, samedi, au prestigieux hôtel Ivoire d’Abidjan, où plus de 1 600 « congressistes » étaient attendus. A l’extérieur de l’établissement, une longue file de militants se dessinait dès le matin, dans l’espoir d’apercevoir l’ancien chef de l’Etat, au pouvoir entre 2000 et 2011.

Acclamé à son arrivée vers 13 heures, M. Gbagbo, costume sombre et masque FFP2 sur le visage, a longuement salué un parterre de cadres et d’anciens ministres du Front populaire ivoirien (FPI), son ancien parti.

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L’ancien président ivoirien Laurent Gbagbo le 16 octobre 2021.

Omniprésent sur la scène politique

Depuis son retour à Abidjan le 17 juin, acquitté par la justice internationale qui le jugeait pour crimes contre l’humanité dans la sanglante crise postélectorale de 2010, M. Gbagbo a été omniprésent sur la scène politique. Visite chez l’ex-président et ancien rival Henri Konan Bédié, rencontre de « réconciliation » avec le chef de l’Etat, Alassane Ouattara, rupture consommée avec son ancien premier ministre Pascal Affi N’Guessan : il est tout de suite redevenu un acteur de premier plan de la vie politique ivoirienne.

Signe d’une certaine détente avec M. Ouattara, le numéro deux du parti au pouvoir, Adama Bictogo, était présent, samedi, au congrès pour « traduire la volonté du président de renforcer la réconciliation ».

Le FPI (son parti historique, fondé dans la clandestinité en 1982) étant désormais aux mains de M. Affi N’Guessan, M. Gbagbo, 76 ans, a choisi de donner un nouveau souffle à son retour en créant sa propre formation, qui devrait s’appeler « Parti des peuples africains - Côte d’Ivoire » (PPA-CI). Dans le nom comme dans le logo – deux mains entrelacées dans une carte d’Afrique – qui seront proposés dimanche, l’accent est mis sur la dimension panafricaine du parti.

L’absence remarquée de Simone Gbagbo

« On voit qu’il a passé une dizaine d’années loin, mais qu’il n’a pas cessé de penser à l’avenir de la Côte d’Ivoire et de l’Afrique », estime Hubert Oulaye, ancien ministre de l’emploi. « Nous attendons sa voix. Ça me plaît que ce soit un parti panafricain, car quand on n’est pas unis, on n’a pas la force. La réconciliation passera par lui », assure Napo Cassaï, un militant venu de la région de Soubré (ouest). « Laurent Gbabgo est le seul qui peut nous donner une indépendance réelle : l’or, le pétrole, le cacao pour nous », renchérit Behi Gbehi, une sexagénaire qui a fait une nuit de bus pour venir de Daloa (centre) assister au congrès.

Pas question pour autant de délaisser la politique nationale en Côte d’Ivoire. Dans l’entourage de l’ancien président, le mot d’ordre est clair : ce nouveau parti vise à recréer un débat politique dans un pays où l’opposition est considérablement affaiblie depuis dix ans.

Reste à savoir quelles personnalités politiques ivoiriennes rejoindront cette plate-forme. Si une majorité des cadres du FPI l’ont suivi dans cette nouvelle aventure, quelques inconnues demeurent.

En particulier celle du rôle de Simone Gbagbo, dont l’absence a été remarquée, samedi. En déplacement en République démocratique du Congo, l’ex-première dame, dont M. Gbagbo a récemment demandé le divorce, multiplie les signaux pour tracer son propre chemin politique.

« Ceux qui veulent nous rejoindre savent à quoi s’en tenir. Nous sommes un parti de gauche et ceux qui s’y retrouvent peuvent venir », glisse Justin Koné Katinan. Le lancement de ce parti, quatre mois après le retour de M. Gbagbo en Côte d’Ivoire, est en tout cas une première étape vers la présidentielle de 2025. Un projet de l’exécutif visant à limiter l’âge des candidats à 75 ans pourrait toutefois constituer un obstacle aux ambitions de M. Gbagbo, qui aura 80 ans en 2025.

Le Monde avec AFP