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Publié par La Tribune Franco-Rwandaise

Par Jean-Claude Escaffit, journaliste retraité, écrivain.
Le 19 mars - qui commémore les accords de 1962 à Evian - n'a pas fini de cristalliser rancceurs et polémiques. Autant l'on peut comprendre le refus de célébrer la date anniversaire d'un cessez-le-feu théorique qui n'a pas marqué - loin de là - la fin des violences en Algérie, autant il faut s'interroger sur les motivations de ceux qui veulent rayer cette date de nos rues et monuments. Et de nos mémoires...

Comnient en finir avec cette instrumentalisation de l'Histoire qui alimente la guerre des mémoires ? Mais quelle date choisir pour célébrer la fin de ce conflit qui a traumatisé des générations de Français ?

Pas question de retenir le 5 juillet 1962, marquant l'indépendance du pays en même temps que les massacres des pieds-noirs d'Oran et...l'anniversaire de la prise d'Alger en 1830. L'Histoire a parfois d'étranges concordances ! Par défaut, une n Journée nationale d'hommage aux morts pour la France en Algérie, a été choisie : le 5 décembre, sans aucune signification historique.

Le choix d'événements mémoriels est révélateur de notre vision de l'Histoire.

À l'évidence, celle-ci est éclatée, pour ne pas dire schizophrénique, En France, on voit persister une mémoire « communautarisée ,, en fonction de nos parcours personnels, de nos appartenances familiales ou idéotogiques. En Algérie, un unanimisme de façade fait perdurer un mythe fondateur et... le maintien du parti au pouvoir.
Je me suis rendu souvent outre-(( Enterrer la hache de guerre du souvenir )) Méditerranée, ces deux dernières années, sur les traces de mon père, mort là-bas (1). La population a tourné la page de sa « guerre de Libération. Pour les moins de 50 ans, c'est '14-18. Et pour les plus âgés, la mémoire est en voie d'apaisement. J'ai aussi assisté à d'émouvantes scènes de fraternisation entre combattants, qui avaient été pourtant sur le même théâtre d'affrontement.

Dans ma propre quête de vérité, j'ai bénéficié d'une étonnante chaîne de solidarité, d'amis et d'inconnus algériens. Ce qui nous a permis, à mon frère et moi, de nous rendre en petite Kabylie sur les lieux, assez risqués aujourd'hui, où est tombé notre père, chef de poste SAS. Et de rencontrer, par un surprenant hasard, l'un des auteurs de l'attentat qui lui a coûté la vie.

Entre les peuples et leurs dirigeants, le fossé reste grand. Englués dans des débats surannés ou doctrinaires, ballottés par des intérêts divergents et des lobbies influents, nos gouvernants respectifs n'ont cessé d'instrumentaliser l'Histoire. Au gré des commémorations et des récits, on a parfois l'impression de ne pas évoquer la même guerre, d'évoluer dans des décors différents. Même à l'intérieur de nos frontières. ll serait temps d'enterrer la hache de guerre du souvenir qui ne fait que raviver blessures et ressentiments.

À défaut d'une vision commune, ne peut-on aller vers une Histoire partagée ? Une manière de regarder ensemble nos responsabilités. Non pour renvoyer l'autre à ses torts et ses errements. Mais pour solder les comptes de nos propres histoires. C'est davantage possible aujourd'hui, avec la génération montante des enfants. Et c'est en tout cas la condition nécessaire d'une mémoire apaisée.
Car il n'est de devoir ge mémoire sans devoir de vérité.
(1) Sur /es traces du père - Questions â I'officier tué en Algérie (éditions Salvator)

ALGÉRIE : DÉPASSER LA GUERRE DES MÉMOIRES
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