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Publié par FRANCE-RWANDA TRIBUNE

François Hollande a longuement expliqué quelle sorte de président il serait et a défendu sa conception de la "présidence normale". Dans une tirade de trois minutes dont chaque phrase commençait par "moi président de la République", il a fustigé l'exercice du pouvoir de Nicolas Sarkozy.


Autres extraits
Compte rendu intégral du débat : économie (partie 2)

Le Monde.fr | 03.05.2012 à 00h50 • Mis à jour le 03.05.2012 à 01h43


Nicolas Sarkozy: Premièrement, il y a un gigantesque problème de coût du travail. Savez-vous quels sont nos deux déficits de balance commerciale ? La Chine, 22 milliards, et l'Allemagne. L'Allemagne est à la fois notre premier client et notre premier fournisseur. Nous avons un problème du coût du travail, pour éviter le cancer des délocalisations, pour penser à ces ouvriers qui vivent la peur au ventre parce qu'ils ont peur que leur usine ferme, il faut que le travail qui se délocalise ne se délocalise plus et, pour cela, il faut alléger le coût du travail. C'est la raison pour laquelle j'ai proposé d'exonérer toutes les entreprises des 5,4 % de cotisations familiales pour que le travail coûte moins cher et que nous puissions le garder. J'ai fait la même chose, d'ailleurs, avec la taxe professionnelle. La taxe professionnelle n'existait plus qu'en France, nous l'avons supprimée. Elle pèse pour 250 euros par voiture produite en France. Deuxième remarque, un gigantesque effort de formation pour que les chômeurs d'aujourd'hui soient formés pour les emplois de demain, et pas pour les emplois d'hier. Troisième élément, l'innovation, ce que nous avons fait avec le crédit impôt recherche, et l'emprunt de 36 milliards d'euros pour favoriser l'investissement et les investissements d'avenir, l'innovation dans toutes nos entreprises. Au fond, le mot-clé est le mot compétitivité.
François Hollande : D'abord, sur les chiffres, je comprends que ça ne vous fasse pas plaisir et, d'ailleurs, ceux à qui ça fait le moins plaisir sont les chômeurs eux-mêmes. Une bonne partie nous regardent et se disent que leur situation s'est dégradée depuis que vous êtes aux responsabilités du pays. Il y a bien 4 millions de personnes qui sont inscrites à Pôle emploi. C'est incontestable. Il y en avait 3 millions au moment où vous avez été élu. Vous avez vous-même dit qu'il y aurait 5 % de la population active qui serait au chômage à la fin du quinquennat. Nous sommes à 10%, le double. Après, vous faites des comparaisons avec l'Allemagne. Votre comparaison est impitoyable. Nous avons reculé. C'est-à-dire que nous, notre chômage a augmenté, notre compétitivité s'est dégradée et l'Allemagne fait dans tout domaine mieux que nous. Alors, ensuite, vous nous dites "ce n'est pas de chance, c'est à cause des 35 heures". Est-ce que je dois vous rappeler que vous êtes au pouvoir depuis dix ans ? Pas simplement cinq ans comme président de la République, mais vous étiez cinq ans ministre sous Jacques Chirac, dont une partie comme ministre de l'économie et des finances. Donc, le résultat de la compétitivité, jamais notre déficit commercial n'a été aussi déséquilibré. Jamais ! 70 milliards d'euros, ce n'est pas la faute à Lionel Jospin il y a dix ans ou, comme vous le dites souvent, à François Mitterrand au début des années 80. c'est votre participation à la responsabilité du pays. Alors, maintenant, vous nous dites " j'ai trouvé la solution, j'ai mis du temps parce que, la TVA sociale, j'y avais songé au début de mon quinquennat 2007, j'y avais renoncé, je ne sais pas pourquoi, mais en tout cas, ça revient à la fin et ça va nous permettre de sauver des emplois ". J'ai regardé votre proposition: TVA sociale, 13 milliards d'euros, qui va d'ailleurs être prélevée sur tous les Français, 300 euros de moins sur leur pouvoir d'achat, ce qui va bien entendu dégrader la croissance. Mais vous nous dites : " ça va améliorer la compétitivité des entreprises exposées à la concurrence internationale ". L'industrie, elle, ne touchera de ces allègements de cotisations sociales sur la famille que 3 milliards d'euros. Ee reste, vous savez qui touche les allègements de cotisations sociales ? Les services, pour 8 milliards; les banques, pour 700 millions d'euros;  trois  fois plus que l'industrie automobile dont vous avez parlé. Donc, ça veut dire que vous inventez une taxe nouvelle sur les Français, qui va prélever sur leur consommation, affaiblir la croissance, pour avoir un effet sur les entreprises industrielles de très faible ampleur et donner un cadeau supplémentaire aux entreprises de service. Allez comprendre ! Et, enfin, vous nous dites " formation ". On est tous d'accord sur la formation. Seulement 10 % des demandeurs d'emploi dans notre pays, et vous êtes président de la République, se voient proposer une formation. Vous nous dites : " maintenant je vais leur proposer... " Mais il est bien temps ! Qu'avez-vous fait depuis cinq ans pour les laisser sans formation et sans qualification ?

Nicolas Sarkozy : Je vais vous répondre très précisément, M. Hollande, parce que ce débat est tellement important qu'il ne souffre aucun mensonge et aucune imprécision. D'ailleurs, vous admettrez qu'entre 2007 et 2012 il y a eu quatre années de crise et vous admettrez certainement que je n'étais pas au pouvoir aux Etats-Unis, en Italie, en Espagne et ailleurs. Vous parlez de l'Allemagne. Considérez-vous maintenant que l'Allemagne, après l'avoir tant critiquée, est un exemple ? Pourquoi l'Allemagne fait mieux que nous ? L'Allemagne a-t-elle fait les 35 heures ? L'Allemagne a fait le contraire de la politique que vous proposez aux Français. L'Allemagne a fait la TVA antidélocalisation que je propose, 3 points; vous la refusez.
François Hollande : Ce n'est pas vrai, la TVA antidélocalisation en Allemagne n'a été que d'un point.
Nicolas Sarkozy : L'Allemagne a fait la TVA antidélocalisation de 3 points. Elle en a affecté un point aux réductions de charge et les autres à la réduction du déficit. Elle a, deuxième point, fait la règle d'or que vous refusez. Troisième point, elle fait les accords compétitivité-emploi que vous refusez, c'est-à-dire la possibilité pour les salariés et les chefs d'entreprise de discuter durée de travail et salaire dans l'entreprise. L'Allemagne que vous citez en exemple pour accabler mon bilan fait le contraire de la politique que vous proposez aux Français. Je veux m'inspirer de ce qui marche, pas de ce qui ne marche pas. Pour moi, l'exemple à suivre, c'est plutôt l'exemple de l'Allemagne que celui de la Grèce ou celui de l'Espagne. Donc, je crains que cet argument ne se retourne violemment contre vous. Troisième élément, vous parlez du déficit comme de la balance commerciale. Il est de 70 milliards, c'est exact. Savez-vous pour combien pèse l'énergie fossile dans les 70 milliards de déficits ?
François Hollande : Oui, je le sais.
Nicolas Sarkozy : Si vous le savez, dites-le: c'est 63 milliards.
François Hollande : Vous savez que ça a toujours pesé dans le commerce extérieur puisqu'il y a toujours eu un prix du pétrole qui a été élevé. Il l'est plus en ce moment, mais il n'empêche. En enlevant l'effet du prix du pétrole, vous avez le déficit du commerce extérieur le plus élevé.
Nicolas Sarkozy : Vous connaissiez le chiffre de 70 milliards et vous ignoriez que sur ces 70 milliards...
François Hollande : Pas du tout. Vous n'êtes pas là pour nous dire ce que je sais ou ne sais pas. Vous ne posez pas les questions ni ne donnez les notes dans cet exercice.
Nicolas Sarkozy : Je ne donne aucune note mais, quand vous vous trompez, je préfère vous le dire: 63 milliards vient du coût des énergies fossiles. Mais, mieux que ça, savez-vous que, ces 63 milliards, c'est 36% de plus par rapport à l'année dernière ? Je pense d'ailleurs qu'il est totalement irresponsable, dans la situation où 63 milliards de notre déficit pèsent sur le coût de l'énergie qui est de plus en plus chère, de vouloir casser la filière nucléaire. Est-il vraiment le moment pour la compétitivité de notre industrie d'attendre le prix du pétrole et du gaz le plus élevé jamais connu pour supprimer le nucléaire ?
David Pujadas : On a prévu d'en parler un peu plus tard.
Nicolas Sarkozy : Enfin, deux remarques sur la TVA. La TVA pèsera sur les importations. Les iPad que vous avez offerts à tous les enfants de Corrèze ont tous été fabriqués en Chine parce qu'il n'y en a pas un seul qui se fabrique en France. Quand on augmente l'importation, ça veut dire que, désormais, ceux qui fabriqueront des ordinateurs, des écrans plats, des iPad à l'extérieur participeront au financement de notre projet social. Deux chiffres: avec ce que je propose, et qui entrera en vigueur au 1er octobre, 94% des employés agricoles auront 1800 euros de cotisation en moins, 65% des employés de l'industrie, 78% des ouvriers de l'industrie automobile. Voilà les chiffres, ils sont incontestables. Enfin, un dernier mot sur ces 10% de chômeurs, c'est un chiffre exact. Mais savez-vous pourquoi ? Parce que la compétence de formation est aujourd'hui partagée entre les syndicats, les régions et l'État. L'État verse aux régions 5,4 milliards pour payer la formation. Sur les 5,4 milliards de crédit de formation versés par l'État pour la formation professionnelle, 4 milliards ont été dépensés. Vous croyez vraiment que c'est de la faute de l'État ? Je pense qu'il faut un changement considérable pour que la formation aille à ceux qui en ont besoin, notamment aux chômeurs. Parce que le drame, ça n'est pas simplement de perdre son emploi, c'est la certitude dans laquelle on se trouve de ne pas pouvoir en trouver un parce qu'on ne vous offre pas la formation dont vous avez besoin.
Laurence Ferrari : Une réponse rapide, monsieur Hollande, vous êtes quasiment à égalité de temps de parole.
David Pujadas : Et il faut qu'on parle du pouvoir d'achat.
François Hollande : On est sur le thème du pouvoir d'achat. Avec vous, c'est très simple, ce n'est jamais de votre faute. Vous avez toujours un bouc émissaire. Là, vous dites " ce n'est pas moi, ce sont les régions, la formation, je n'y peux rien ". Sur le chômage, " ce n'est pas moi, c'est la crise qui nous a frappés ". Sur l'Allemagne, " qu'est-ce que vous voulez, j'ai mis cinq ans avant de comprendre quel était le modèle allemand. Avant, j'avais le modèle anglo-saxon à l'esprit ". Ce n'est jamais de votre faute. Vous aviez dit 5% de chômage, c'est 10% de taux de chômage. Ce n'est pas de votre faute, c'est la faute à la crise, jamais vous. Je vous remercie d'avoir cité les iPad que je mets à distribution des collégiens de Corrèze, mais comprenez bien que, lorsqu'un prix d'un produit est relevé, que ce produit est acheté par le consommateur, c'est bien un prélèvement sur le consommateur, il n'y a pas de substitution par rapport à un produit français. Et, donc, cette TVA que vous allez imposer va prélever du pouvoir d'achat. J'ai fait le calcul, 300 euros pour un couple de smicards, voilà ce que va être le prélèvement annuel que vous allez infliger pour une baisse de cotisations dont j'ai dit que seuls 3 milliards d'euros vont être affectés à l'industrie, donc, à ce qui peut nous relever dans le commerce extérieur. Vous avez voulu faire des chiffres du commerce extérieur un élément polémique, mais vous vous trompez. Quand Lionel Jospin a quitté la responsabilité du pays, en 2002, il y avait déjà un prix du pétrole, il y avait déjà un pétrole cher,et  les comptes extérieurs de la France étaient équilibrés. Aujourd'hui, les comptes extérieurs de la France sont déficitaires de 70 milliards avec une facture pétrolière qui a sensiblement augmenté, mais pas de plus de 30%. Donc, votre déficit du commerce extérieur est structurel, ça fait cinq ans qu'il s'est accru chaque année. Voilà le bilan. Alors, maintenant, sur la compétitivité, qu'est-ce qu'on peut faire de mieux ? Il y a l'innovation, l'investissement et pas simplement la baisse du coût du travail. Vous nous dites les accords compétitivité-emploi. La belle idée que vous avez lancée! Sauf que ça va avoir comme conséquence qu'il n'y aura plus de durée légale de travail puisqu'employeurs et partenaires sociaux, qui se mettront d'accord, j'en conviens, considéreront qu'il n'y a plus de durée légale du travail. Plus d'heures supplémentaires, mais simplement un arrangement. Donc, on va, là aussi, vers le démantèlement d'un principe qui était celui de la durée légale du travail.
David Pujadas : Réponse sur ce point et on change de chapitre si vous en êtes d'accord.
Nicolas Sarkozy : Monsieur Hollande peut me reprocher bien des choses, et je le comprends bien, mais pas de ne pas assumer mes responsabilités. On m'a même reproché le contraire. J'ai toujours assumé mes responsabilités et je considère que c'est normal quand on est président de la République. Si la TVA antidélocalisation était une si mauvaise idée, on se demande bien pourquoi votre propre porte-parole, Manuel Valls, en a fait le thème de sa campagne dans les primaires socialistes, puisque j'ai entendu Manuel Valls, aujourd'hui votre propre porte-parole, dire que la TVA anti-délocalisation était la solution. Et il avait raison. J'ajoute que je ne vois pas comment vous pouvez dire " l'Allemagne fait mieux que nous, mais on ne va prendre aucune des mesures qu'a prises l'Allemagne pour réussir ". L'Allemagne a pris la TVA antidélocalisation, l'Allemagne a pris les accords compétitivité-emploi. Les accords compétitivité-emploi, il faut que les gens qui nous regardent comprennent ce dont il s'agit. Nous, nous avons une tradition fixée par la loi et ça tue tout le dialogue. L'idée, c'est de garder une loi: à partir de 35 heures, ce sera les heures supplémentaires mais si, dans l'entreprise, salariés et chef d'entreprise se mettent d'accord pour augmenter les salaires, pour augmenter la durée de travail ou, au contraire, pour réduire la durée de travail parce que le carnet de commandes ne va pas, l'accord dans l'entreprise prime sur la loi et sur le contrat individuel. Ça s'appelle faire confiance; ça s'appelle prendre la responsabilité; ça s'appelle une économie moderne dans un monde moderne. On a par ailleurs une limite: c'est que, pour arriver à cela, il faut qu'une majorité de salariés le souhaite. Au nom de quoi, monsieur Hollande, on va considérer que c'est encore la lutte des classes dans les entreprises, que dans une petite entreprise de 30 ou 50 personnes, si les salariés veulent travailler plus pour gagner davantage, si le chef d'entreprise est d'accord, ou au contraire s'il y a un coup dur, si le carnet de commandes diminue, et qu'il faut que chacun puisse s'adapter, c'est la loi, c'est l'État qui va les empêcher de se mettre d'accord ? Au nom de quoi ? Et pour quoi ? Enfin, sur monsieur Jospin. Décidément, vous êtes fâché avec les chiffres. Vous êtes de la Cour des comptes, vous devriez connaître les chiffres. Monsieur Jospin a bénéficié d'une période de croissance extraordinaire, tant mieux pour lui. Mais le commerce extérieur en 2000 et en 2001 était en déficit.
François Hollande : Non, il ne l'était pas. Vous vérifierez vos chiffres car, comme vous dites, je suis de la Cour des comptes, je vous remercie de l'avoir rappelé. Et mes chiffres sont exacts, vous les revérifierez.
Nicolas Sarkozy : Je vous le dis.
François Hollande : Merci, car chacun pourra en témoigner.
Nicolas Sarkozy : Bien sûr. Sur l'innovation, pourquoi avez-vous voté contre le grand emprunt et la commission Rocard-Juppé ? C'était quoi ? C'est de l'argent mobilisé pour l'investissement et pas pour les dépenses de fonctionnement. Pourquoi étiez-vous contre ? Pourquoi avez-vous voté contre la suppression de la taxe professionnelle alors que ça pèse sur la production ? Pourquoi venir faire des grands discours sur ce que vous allez faire alors que, pendant cinq ans, dans ce que j'ai fait, il y avait des choses dans lesquelles vous auriez pu vous reconnaître. Vous avez voté non à tout, vous allez essayer de démolir tout, vous avez été contre tout, et maintenant vous venez dire aux Français : " j'ai changé d'avis, il faut plus d'innovation, il faut plus d'investissements ". Alors, l'Allemagne a fait tout le contraire mais, quand les chiffres de l'Allemagne sont bons, on me dit : " c'est de votre faute, regardez ils font mieux ". Quand je dis : " regardez ce qu'ils font en Allemagne, on va essayer de s'en inspirer ", vous dites : " non, ce n'est pas ce qu'il faut ". La vérité, c'est que votre proposition pour la croissance, il n'y a pas un pays au monde qui ait fait ce choix. C'est plus d'impôts, plus de cotisations, plus de dépenses, et plus de déficits.
François Hollande : Je n'ai pas parlé d'impôts, de dépenses et de cotisations. Ça tombe un peu mal votre dernière sortie.
Nicolas Sarkozy : Dans votre campagne... Vous n'en avez pas parlé dans votre projet ? Les impôts, les comptes publics.
François Hollande : On va y venir. Mais sur la croissance, vous l'avez misée à 0%, donc vous n'êtes pas forcément le mieux autorisé, ou le plus compétent, pour nous dire comment il conviendrait de la relancer.
Nicolas Sarkozy : Quel est le pays...
François Hollande : Je n'ai pas terminé.
Nicolas Sarkozy : Juste un mot. Quel est le pays, le pays, il y en a un, qui n'a pas connu un trimestre de récession depuis 2009 ? C'est la France.
François Hollande : Vous avez connu la récession...
Nicolas Sarkozy : C'est la France, c'est la France.
François Hollande : Vous êtes toujours content de vous ! Ce qui est extraordinaire, c'est que, quoi qu'il arrive, quoi qu'il se passe, vous êtes content. Les Français le sont moins mais,vous, vous êtes content. Je dois ajouter sur la croissance, puisque vous en parlez, que nous sommes...
Nicolas Sarkozy : Dois-je considérer que, quand vous augmentez de façon éhontée, je dois accepter...
François Hollande : Pour l'instant, je n'ai rien dit qui puisse justifier cette expression.
Nicolas Sarkozy : C'est un mensonge.
François Hollande : Non. Lequel ? Lequel ?
Nicolas Sarkozy : C'est un mensonge.
François Hollande : Lequel ?
Nicolas Sarkozy : Quand vous dites " je suis toujours content de moi ", que je ne prends pas mes responsabilités, c'est un mensonge.
François Hollande : Vous êtes très mécontent de vous. J'ai dû me tromper, j'ai dû faire une erreur. Je me mets à présenter mes excuses, vous êtes très mécontent de vous.
Nicolas Sarkozy : Ce n'est pas le concours de... Monsieur Hollande, ce n'est pas le concours de la petite blague.
François Hollande : Non, ce n'est pas la blague non plus. Mais je ne peux pas me faire traiter ici de menteur.
Nicolas Sarkozy : On n'est pas venu... Je vous ai posé une question...
François Hollande : Donc, vous ne seriez pas capable de me dire quoi que ce soit dans cette direction.
Nicolas Sarkozy : Y a-t-il un pays au monde...
François Hollande : Quelle remarque désagréable venant de votre part.
Nicolas Sarkozy : Il n'y a pas de remarque désagréable. Y a-t-il un pays au monde qui a fait mieux ? Y a-t-il un pays d'Europe et de l'OCDE qui a fait mieux en termes de croissance que la France depuis 2009? Il n'y en a pas.
François Hollande : Si, les États-Unis ont fait mieux que la France en termes de croissance.
Nicolas Sarkozy : Non, nous n'avons pas connu un trimestre par...

François Hollande : Les États-Unis... Les États-Unis ont fait mieux que nous en termes de croissance. L'Allemagne a fait mieux que nous en termes de croissance.

Nicolas Sarkozy : Non, l'Allemagne a connu une récession.
François Hollande : L'Allemagne a fait 3% de croissance sur l'ensemble de la période. L'Allemagne a fait mieux, les États-Unis ont fait mieux. Et, donc, vous ne pouvez pas dire que la France s'en soit tirée mieux que les autres. Ce n'est pas vrai.
Nicolas Sarkozy : Sur l'ensemble de la période...
François Hollande : Les États-Unis et l'Allemagne ont fait mieux que nous.
Nicolas Sarkozy : Sur l'ensemble de la période, c'est certain. Mais, depuis 2009, la France est le seul pays qui n'a pas connu un trimestre de récession.
François Hollande : Mais avec une croissance tellement faible que nous sommes aujourd'hui à 0,7 quand les Allemands sont à un peu plus de 1, et quand les Américains sont à 2.
Nicolas Sarkozy : Juste un mot, combien avons-nous fait l'année dernière ?
François Hollande : Nous avons fait 1,7.
Nicolas Sarkozy : J'avais annoncé qu'on ferait 1,7. Vous aviez dit : " c'est un mensonge, il n'y arrivera pas ". Nous avons fait 1,75.
François Hollande : Mais vous avez toujours, c'est terrible, dans votre esprit le mot mensonge, comme si c'était quelque chose que vous ressentiez très particulièrement.
Nicolas Sarkozy : C'est vous.

François Hollande : Non, vous venez encore de le répéter.
Nicolas Sarkozy : Non, c'est vous qui l'avez dit monsieur Hollande. Au niveau du vote du budget en 2011...
François Hollande : Nicolas Sarkozy, si vous permettez qu'on ait cet échange sans qu'il ne tombe dans une forme d'invective, si vous me permettez de parler une seconde.
Nicolas Sarkozy : Mais, en 2011, est-ce qu'il était exact que vous ne croyiez pas à mes prévisions de croissance ?
François Hollande : Mais, est-ce que...
Nicolas Sarkozy : Est-ce que c'est exact ou pas ?
François Hollande : Mais vos prévisions de croissance en 2011 devaient être près de 2. Vous les avez ramenées à 1,7, c'était plus prudent. Elles étaient au départ de 2. Je n'y croyais pas. C'est tombé à 1,7.
François Hollande : Et cette fois-ci, ça devait être de 1, c'est tombé à 0,7. Donc mes prévisions étaient meilleures que les vôtres. Maintenant, j'y reviens, vous avez parlé des accords de compétitivité-emploi. Ce n'est pas la même chose ce qui se fait en Allemagne, ce que vous proposez.
En Allemagne, il y a des partenaires sociaux, ils sont respectés, parce que les organisations syndicales sont reconnues. Il y a une capacité à permettre l'assouplissement de la vie de l'entreprise, notamment grâce à un chômage partiel qui a empêché bien des licenciements, bien des licenciements. Quand l'Allemagne met plusieurs milliards pour l'aide au chômage partiel, nous, en France, on a attendu pour mettre en place un mécanisme de chômage partiel. Donc, vous avez été en retard. D'où l'ampleur du chômage. Je vais venir maintenant sur la question de la TVA, parce que nous y sommes. La question de la TVA qui va peser, dès le mois d'octobre, sur le pouvoir d'achat des Français. Je considère que 300 euros,  sur un couple de smicards, c'est inacceptable. Mes propositions en termes de pouvoir d'achat ? C'est d'abord de faire en sorte que les salaires puissent être liés à la croissance. Et, donc, le SMIC sera indexé non seulement sur les prix, mais sur une part de la croissance. Chaque fois que la croissance s'élèvera, le SMIC sera réajusté. Le coup de pouce sur le SMIC sera donc fonction de la croissance. Deuxièmement, je considère qu'aujourd'hui il y a une part de dépenses contraintes très élevée. Nos concitoyens vivent avec des prix de l'électricité, du gaz, de l'eau, qui ont considérablement augmenté. Donc, j'instaurerai un forfait de base qui fera que les consommateurs, jusqu'à un certain niveau, un volume de leurs consommations, paieront le même tarif. Et c'est ensuite, en fonction de leurs propres consommations, qu'ils paieront un tarif supérieur. Donc une progressivité.
David Pujadas Y compris sur l'essence ? Sur les carburants ?
François Hollande : Sur l'essence, j'ai dit qu'il y aurait un blocage pendant trois mois du prix de l'essence, et l'instauration de la TIPP flottante, c'est-à-dire que l'État ne pourra pas gagner un seul centime d'euro sur le prix des carburants. Aujourd'hui, il y a une TVA qui s'applique au prix de l'essence, ce qui fait que chaque fois que le prix de l'essence augmente, l'État gagne par la TVA des recettes supplémentaires. Ça ne sera plus le cas.
David Pujadas Nicolas Sarkozy, vos solutions ?
François Hollande : Enfin, j'augmenterai de 25% l'allocation de rentrée scolaire, dès cet été, parce que je considère que les familles doivent être soutenues dans ces moments particulièrement difficiles.
Laurence Ferrari : Vos solutions pour le pouvoir d'achat?
Nicolas Sarkozy : Un mot sur les syndicats en Allemagne. D'abord, il ne viendrait à l'idée de personne en Allemagne que les syndicats appellent à voter pour un parti. Personne. Il n'y a qu'en France, cette année, où on voit ça. Quand les syndicats font de la politique, ils ne peuvent pas défendre les syndiqués.
François Hollande : Ce n'est pas vrai, parce qu'en Allemagne les syndicats sont très liés au Parti social-démocrate, vous devriez le savoir.
Nicolas Sarkozy : Oui, ce n'est pas vrai. Ce qui a  permis d'ailleurs aux syndicats d'être favorables à la règle d'or que vous contestez. Deuxième élément sur le chômage partiel: savez-vous combien nous avons financé de millions d'heures de chômage partiel en France ? 180 millions. Nous avons financé 180 millions d'heures de chômage partiel. Les Français doivent le savoir quand le carnet de commandes dans l'entreprise diminue. Au lieu de mettre la personne au chômage, l'État prend à sa charge, avec les syndicats d'ailleurs, le temps de formation quand la personne ne va pas à l'usine ou au bureau parce qu'il n'y a pas de travail. Monsieur Hollande vient de dire qu'on a été en retard, qu'on n'a rien fait: 180 millions d'heures payées, c'est plus d'un milliard d'euros. Le pouvoir d'achat, la première chose que nous avons fait, c'est les heures supplémentaires: 9 millions de salariés, 9 million, ont touché des heures supplémentaires malgré la crise l'année dernière. C'est presque 500 euros en moyenne de pouvoir d'achat en plus, puisqu'ils ne payent pas d'impôts dessus et les entreprises ne payent pas de charges dessus. 53 % des ouvriers ont touché ces heures supplémentaires. Pourquoi vouloir les supprimer ? Quand vous dites : " on va donner un coup de pouce au SMIC ", combien de personnes touchent le SMIC ? Moins de 15 %. Pourquoi oublier les 85 % qui ne touchent pas le SMIC ? Vous allez augmenter le SMIC, donc vous allez éloigner de l'emploi et de l'entreprise des gens qui ont déjà tant de mal à s'y intégrer. Les heures supplémentaires ont augmenté le pouvoir d'achat. L'une des mesures de Monsieur Hollande, c'est de supprimer cela. On se demande pourquoi. Enfin, les deux dernières mesures, tarif de gaz et d électricité: alors voilà maintenant qu'on va payer son électricité et son gaz en fonction de son impôt sur le revenu ? Si j'ai bien compris.
François Hollande : Non, en fonction de sa consommation. Ce n'est pas tout à fait la même chose.
Nicolas Sarkozy : Je n'ai pas compris.
François Hollande : En fonction de sa consommation.
Nicolas Sarkozy : C'est-à-dire, ça va fonctionner comment cette affaire ?
François Hollande : C'est-à-dire que, plus vous consommez, plus le tarif s'élève.
Nicolas Sarkozy : Ah bon ? Parce que dans votre projet, c'était sur les revenus.
François Hollande : Non, jamais, mais si vous voulez que je vous passe le projet je vous le donnerai.
Nicolas Sarkozy : Je serai très heureux parce qu'il y a plusieurs projets et puis vous changez plusieurs fois de position.
François Hollande : Non, il n'y en a qu'un et il est à votre disposition. Moi, je ne connais pas le vôtre, mais moi, le mien, il est à votre disposition.
Nicolas Sarkozy : Ça veut donc dire que cette mesure va s'appliquer aussi pour les entreprises et les industries ?
François Hollande : Non, il ne s'agit que des ménages.
Nicolas Sarkozy : Ah bon ? Ça ne s'appliquera pas pour les entreprises ? C'est-à-dire que plus une entreprise consommera parce qu'elle aura besoin d'industrie, elle, elle restera avec le même niveau ? Mais qu'une famille nombreuse qui a un appartement plus grand ou une maison, alors, elle, elle payera plus cher ? C'est-à-dire qu'on n'aura pas le même tarif pour les entreprises.
François Hollande : C'est par personne que ça se formulera et, quant aux entreprises, vous savez très bien qu'elles ont des tarifs particuliers.
Nicolas Sarkozy : Donc il y aura une règle pour les particuliers et une règle pour les entreprises ?
François Hollande : C'est ce qui se passe aujourd'hui.
Nicolas Sarkozy : Plus un particulier consommera, plus ce sera cher. Mais plus l'entreprise consommera, ça ne sera pas le même cas. Un mot sur l'essence, le blocage des prix. Alors, là, on est vraiment stupéfié. Le blocage des prix, mais vous allez bloquer quoi comme prix ? Vous n'allez pas bloquer le prix du baril de Brent que vous allez acheter ?
François Hollande : Non, personne ne l'imagine. Ne faites pas là-dessus de digression. Ce n'est pas sur le prix d'achat du pétrole que nous allons le bloquer, il est sur le marché. C'est sur le prix de la distribution du carburant raffiné.
Nicolas Sarkozy : Parfait. Je voulais en venir là, donc vous êtes bien d'accord que vous allez continuer, que l'État va continuer à acheter du baril de Brent.
François Hollande : Ce n'est pas l'État qui achète.
Nicolas Sarkozy : Que les entreprises vont toujours acheter du baril de Brent à des prix sans arrêt plus élevés, que vous allez décider administrativement de bloquer les prix, comme si la France était un îlot isolé du monde et qui va payer ? Qui va payer ? C'est le contribuable, parce qu'il y a deux poches, Monsieur Hollande, il n'y en a pas trois. Il y a la poche du contribuable ou il y a la poche du consommateur.  Juste un mot pour terminer là-dessus. Deux centimes de moins sur le litre d'essence, c'est un milliard d'euros de déficit en plus. Est-ce que ça vaut la peine ? Est-ce qu'il ne vaut pas mieux mettre en œuvre la politique que le gouvernement a voulu mettre en œuvre pour aider les gens à acheter des voitures moins consommatrices d'essence, pour faire des économies d'énergie ? Enfin, je vais vous dire une chose, quand le prix de l'essence augmente, les gens essayent de consommer moins, donc ça ne ramène pas plus au Trésor public, donc j'aimerais savoir comment vous allez faire pour réduire les déficits d'un côté, augmenter l'allocation de rentrée scolaire, subventionner le prix de l'essence, augmenter toutes les prestations et vous faites comment ?
François Hollande : C'est la méthode que vous utilisez, augmenter toutes les prestations, vous ai-je parlé de ça ?
Nicolas Sarkozy : Oui.
François Hollande : Je vous ai parlé de l'allocation de rentrée scolaire, ce n'est pas toutes les prestations, vous en conviendrez ? Deuxièmement, sur les carburants, vous, vous dites : " je ne peux rien, je laisse les Français vivre avec ces prix des carburants " qui font que dans des départements ruraux, pour ceux qui vont à leur travail, c'est devenu un prélèvement insupportable, et après on s'étonne qu'il y ait des votes de colère, parce que c'est très difficile de se déplacer autrement que par son automobile pour aller à son travail. Vous, vous dites : " moi, de toute façon, je suis impuissant, je reste là, je constate et mettrai un peu plus de concurrence ". C'est un mot que vous avez utilisé.
Nicolas Sarkozy : Ce n'est pas blessant Monsieur Hollande ?
François Hollande : Deuxièmement, sur la TIPP, ne m'interrompez pas parce que je ne le fais pas.
Nicolas Sarkozy : Ce n'est pas blessant de dire ça?
François Hollande : Sur la TIPP flottante, vous dites : " ça va coûter à l'État ", mais, non, ça ne coûtera pas à l'État, puisque l'État reçoit par la TVA une recette supplémentaire. Je veux redistribuer ce que l'État récupère sur ces taxes. Enfin, le blocage de trois mois, ce n'est pas une solution durable, mais il faut qu'on y voie clair, quand même, sur les mécanismes de distribution. Est-il normal qu'un distributeur stocke les carburants raffinés à un certain prix ? Celui qui l'a acheté au moment sur le marché puis le vend avec le prix qui est le prix effectivement trois mois après le plus élevé et qu'il prenne une rente ? Non, ce n'est pas normal et, donc, nous mettrons au clair les mécanismes de la distribution. Ce n'est pas le contribuable qui payera, c'est le distributeur qui aura à supporter finalement ce qui a été son opacité pendant trois mois.
Nicolas Sarkozy : Juste un mot pour terminer là-dessus. Je mets de côté la remarque sur les puissants. La meilleure économie d'énergie, Monsieur Hollande, c'est l'économie d'énergie. Laisser à penser aux Français que le prix du pétrole et le prix du gaz vont pouvoir diminuer et qu'on va pouvoir bloquer les prix, il n'y a pas un pays au monde qui réagit comme ça, pas un seul et, naturellement, c'est le contribuable qui payera, c'est le contribuable qui payera cette démagogie. Mais je répète une question. Grâce au nucléaire, nous payons l'électricité et le chauffage 35 % moins cher. En conscience, est-ce que c'est vraiment le moment, alors que le prix du pétrole explose, que  le prix du gaz explose, est-il vraiment le moment de vouloir démanteler l'industrie nucléaire, de vouloir fermer la moitié des réacteurs nucléaires?
François Hollande : Je ne le fais pas maintenant. Il n'y a qu'une seule centrale sur le prochain quinquennat.
S'il vous plaît, pour la clarté du débat, s'il vous plaît, on va s'arrêter là. On parle des comptes publics, on est dans l'économie.

 

 
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