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Publié par JMV Ndagijimana

Les affaires « Docteur Rwamucyo Eugène » et  «  Abbé Emmanuel Uwayezu » qui défraient la chronique depuis quelques jours illustrent encore une fois comment une organisation internationale et une ONG ayant perdu toute neutralité pour épouser les vues d’un régime dictatorial peuvent devenir des sources de persécution de tous ceux qui n’épousent pas les vues de ce régime.

Le Dr Rwamucyo est ce médecin rwandais qui exerçait à Maubeuge en France et qui vient d’être suspendu de ses fonctions. Son nom, qui figure sur les avis de recherche remis par Kigali à INTERPOL, aurait été découvert par « hasard » par une infirmière en tapant sur  Google ! Aussi incroyable que cette anecdote puisse paraître, - on comprend mal en effet comment le premier réflexe d’une infirmière blessée par les propos du médecin du travail fut d’aller sur Google au lieu de s’adresser aux syndicats ou à la direction de l’hôpital -, tout laisse penser que toute cette histoire fut conçue par le régime de Kigali et mise en exécution par les relais du régime en France en utilisant les fichiers fournis à INTERPOL par le FPR.

Dans un article publié sur son site web le 19 janvier 2008, Gaspard Musabyimana dénonçait déjà l’instrumentalisation d’INTERPOL par le régime de Kigali. Il écrivait :

« Kigali a réussi à instrumentaliser l'association internationale de coopération policière Interpol qui vient d’entrer avec force dans les arcanes du problème rwandais.

Tout a commencé en 2006 quand Interpol a mis sur son site Internet un lien provenant d’un site du Gouvernement rwandais et reprenant une liste de 93 accusés établis à l'étranger. Avaliser la liste du Gouvernement rwandais revenait à jeter en pâture les noms des personnes qui devraient normalement bénéficier du principe universel de la présomption d’innocence. Le caractère fantaisiste et criminel des listes établies par le Gouvernement de Kigali n’a été cessé d’être dénoncé par des observateurs avertis. Elles condamnent avant jugement et constituent une arme politique redoutable et un raccourci pour le FPR de se débarrasser facilement de ses opposants politiques ou ceux dont ils soupçonnent de n’être pas d’accord avec sa politique. Elles font beaucoup de dégâts dans les rangs des rwandais, ceux de l’intérieur comme ceux de l’extérieur du pays.

Elles varient au gré des humeurs des dirigeants de Kigali. Ainsi depuis sa prise de pouvoir en juillet 1994, le FPR a publié plus de 5 listes : celle de 1994 comprenait 428 personnes, celle de 1996 en avait jusqu’à 1946 et 2898 personnes figuraient sur la liste publiée en 2001. En 2007, les Services de renseignements extérieurs avaient recensés jusqu’à 40.0000 "génocidaires" se trouvant à l’étranger ».

La dernière liste en date (revue, corrigée et complétée par le FPR) et que brandit Interpol comporte quelques 105 noms et que l’on peut retrouver à la façon de l’infirmière qui a "découvert" le Dr Rwamucyo. Cette liste est truffée de surréalisme qu’elle prêterait à sourire ou finirait tout droit dans la poubelle si elle ne constituait pas le symbole visible de l’arbitraire, de la diabolisation et du lynchage dont sont victimes des Rwandais qui sont dans le collimateur du régime de Kigali. Ainsi on n’y retrouve :

- Bagambiki Emanuel (n° 13) : Cet ex-Préfet a été arrêté par le TPIR le 5 juin 1998. Le 25 février 2004, il fut acquitté par cette juridiction après un long procès. Le 8 février 2006, la chambre d’appel a confirmé le jugement. Non contentes de cette libération, les autorités rwandaises évoquèrent les crimes sexuels dont l’intéressé se serait rendu coupable. Pourtant au cours du procès, le Procureur du TPIR avait tenté vainement d’introduire ce chef d’accusation, mais il fut débouté par la Cour et dut le retirer faute de preuves.

Que le Rwanda continue à s’acharner sur Emmanuel Bagambiki, c’est de bonne guerre. Mais qu’INTERPOL lui emboîte le pas, cela dépasse l’entendement !

- Safari Stanley (n° 9) : Cadre du MDR (Mouvement Démocratique Républicain, parti politique d’opposotion au régime de l’ex-Président Habyarimana), il est membre du Parlement rwandais sans discontinuer depuis la prise du pouvoir par le FPR du Général Kagame en 1994 jusqu’en 2009. Sa disgrâce et sa condamnation précipitée par les tribunaux Gacaca qui ont prononcé, en son absence, sa réclusion criminelle à perpétuité, viserait, selon des sources bien informées, à le punir à cause des propos tenus à une délégation de la  Commission de l’Union Européenne dans lesquels il fait mention de la réduction de l’espace politique par le FPR. Pour ce fait, il figure sur la liste des "génocidaires" recherchés.

- Rwigema Pierre Célestin (n° 82) : Ex-cadre su parti MDR, il n’a jamais fui le pays et à la prise du pouvoir par le FPR, Rwigema PC fut ministre puis Premier Ministre du régime FPR de 1995 à 2000. Il s’est exilé depuis lors aux USA et mis alors sur la liste des "génocidaires".

- Munyeshyaka Wenceslas (n° 49) et Bucyibaruta Laurent (n° 23): Ce prélat et cet ex-préfet ont été inculpés par le TPIR mais cette juridiction internationale s’est dessaisie au profit de la justice française, procédure prévue par les règlements du TPIR. INTERPOL ne serait-elle pas informée de cette évolution de façon à maintenir les intéressées sur la liste des personnes recherchées ?

- Mbarushimana Callixte (n° 38): Engagé comme informaticien auprès de la Mission de l’ONU au Kosovo, il fut arrêté sur demande de Kigali en 2001. Il fut jugé et acquitté par un tribunal spécial du Kosovo. Etabli en France et porte-parole d’un mouvement politico-militaire (FDLR), il fut réarrêté en Allemagne en juillet 2008 lors d’un voyage, pour les mêmes griefs. Il fut de nouveau libéré faute de preuves. Pourquoi Interpol le maintient-il toujours sur la liste des personnes recherchées ?

- Ahorugeze Sylvère (n° 12) : Arrêté en septembre 2006 au Danemark puis relâché par le Procureur danois le 10 aout 2007 pour manque de preuves, il fut réarrêté en Suède le 16 juillet 2008 dans l’enceinte même de l’ambassade du Rwanda où il était allé demander le passeport pour son épouse qui voulait se rendre au Rwanda. Le 9 juillet 2009, le gouvernement suédois a indiqué qu’Ahorugeze Sylvère serait extradé vers le TPIR mais l'ordre d'extradition a été suspendu le 16 juillet 2009 suite à un recours auprès de la Cour Européenne des Droits de l’Homme.

- Simbikangwa Pascal (n° 89) : Il a été arrêté aux Iles Comores (territoire français d’Outre-Mer) et il attend son procès. Pourquoi alors figure-t-il sur la liste comme étant toujours recherché ?

- Bajinya Vincent (n° 14) : Ce médecin rwandais avait été arrêté en Angleterre sur demande de Kigali. Il fut traîné en justice et faillit être extradé vers le Rwanda car le ministre de l’Intérieur britannique avait marqué son accord pour cette extradition. Finalement, le 09/04/2009, la Haute Cour (High Court) britannique refusa l’extradition et ordonna sa libération.

- Munyakazi Léopold (n° 47) : Ce professeur a été emprisonné au Rwanda de 1994 à 1999 date à laquelle il fut libéré. Profitant d’un séjour professionnel aux États-Unis en 2004, Leopold Munyakazi demanda asile politique dans ce pays. S’exprimant sur les événements du Rwanda de 1994 lors d’une conférence publique aux USA, le régime de Kigali n’avait pas apprécié le langage qu’il avait employé qui contrastait avec la version officielle. Il fut ainsi mis sur la liste comme étant un "génocidaire" recherché laquelle fut refilée à INTERPOL. Il a perdu depuis lors son emploi à l'université de Groucher.

L’Abbé Emmanuel Uwayezu est ce prêtre rwandais officiant en Italie qui vient d’être arrêté suite au même avis de recherche remis à INTERPOL par Kigali. Jusqu’ici, rien de spécial dès lors qu’il figurait sur la fameuse liste. Mais une dépêche d’agences (AFP, Belga) datée du 20/10/2009 laissait entendre que : «  Le prêtre catholique est accusé par l'ONG African Rights, basée à Londres, d'être impliqué dans le massacre le 7 mai 1994 "de plus de 80 jeunes élèves, âgés de 12 à 20 ans" qui étudiaient au groupe scolaire Marie merci de Kibeho (sud) dont il était le directeur ».

Et voilà lâché le nom de African Rights. Cette ONG basée à Londres n’est pas une inconnue sur le scène politique rwandaise. Une de ses activistes est même « trop connue » de rwandais. Il y a peu, Gaspard Musabyimana brossait son portait et nous la présentait sous un autre éclairage dépouillée de la couverture de « défense des droits de l’homme ». Il disait :

« Rakiya Omaar, de l'organisation "African Rights" se présente comme activiste des Droits de l'Homme. Sa neutralité a été mise en cause depuis longtemps. Des documents existent comme quoi elle est payée par le Rwanda pour produire des rapports conformes aux thèses du régime de Paul Kagame.

Rakiya Omaar travaille pour le compte du FPR. Elle se fait payer pour produire des documents conformes aux thèses du régime que le FPR brandit dans l’opinion internationale. La neutralité de Rakiya Omaar d’African Rights est donc mise à mal et d’autres documents existent montrant sa compromission avec le FPR en vue d’accabler des Hutu en exil ».

Dans le même article sont reproduits des documents prouvant que Rayika Omaar est rémunérée par le gouvernement rwandais pour sa traque des réfugiés hutu. Elle vient donc de frapper encore une fois et malheuresement pas la dernière.

Ainsi donc, là où les médias nous rabattent les oreilles comme quoi les fins limiers agents d’INTERPOL grâce à leur travail de fourmis sont parvenus à débusquer un "présumé génocidaire" caché en France depuis des années, ou qu’une organisation de défense des droits de l’homme basée à Londres a enquêté sur les crimes commis par un prêtre réfugié en Italie, ce qui aboutit à son arrestation, les observateurs avisés n’y verront que des actes du bras tentaculaire du régime dictatorial du FPR qui peut frapper où il veut, quand il veut et qui il veut.

A bon entendeur, Salut.

Emmanuel Neretse
Gaspard Musabyimana
25/10/2009

 

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